Il y a des morts qui ne cesseront jamais de troubler la conscience collective. Celle de Soumeylou Boubèye Maïga en fait partie. Chacun de nous doit se dire aujourd’hui qu’il n’a pas assez fait pour obliger les autorités de la transition à l’évacuer pour bénéficier des soins appropriés. Fatalistes, nous pouvons toujours nous soulager en se disant que cela n’aurait pas empêché sa mort ce lundi 21 mars 2022. Certes, mais on serait aussi apaisé d’avoir tout fait pour lui sauver la vie. Hélas, le regret, c’est toujours pour ceux qui survivent.
L’ancien Premier ministre malien, Soumeylou Boubèye est décédé lundi dernier (21 mars 2022) à la Polyclinique Pasteur de Bamako où il était admis depuis décembre dernier, ont annoncé des sources proches de la famille. Incarcéré depuis août 2021, son état de santé n’a cessé de se dégrader ces dernières semaines. Mais ses demandes d’évacuation sanitaire ont été rejetées malgré des expertises médicales favorables.
Inculpé dans l’affaire dite de l’avion présidentiel, l’ancien Premier ministre (2017-2019) de feu Ibrahim Boubacar Keïta (l’ancien président malien décédé le 16 janvier dernier), il a été placé sous mandat de dépôt en août 2021. Et depuis, sa santé s’est considérablement détériorée.
C’est ainsi que, le 16 décembre dernier, il a été hospitalisé à la Polyclinique Pasteur de Bamako à la demande de sa famille qui a continué à demander son évacuation sanitaire pour qu’il puisse bénéficier d’une meilleure prise en charge médicale à l’étranger. Des demandes qui ont été toutes rejetées par les autorités maliennes malgré les avis favorables des expertises médicales demandées. L’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme au Mali, M. Alioune Tine, a demandé en février dernier au gouvernement de prendre les dispositions pour son évacuation. «J’ai reçu plusieurs alertes sur la dégradation grave et continue de la santé du PM (Premier ministre) Soumeylou Boubèye Maïga», a alerté Alioune Tine 3 jours avant sa disparition.
Né le 8 juin 1954 à Gao (67 ans) et surnommé par le «Tigre de Badalabougou» dans l’arène politique malienne, Soumeylou Boubèye Maïga a été une figure emblématique du Mouvement démocratique malien, donc de la vie politique malienne. Membre fondateur de l’Alliance pour la Démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA-PASJ qui a dirigé le Mali de 1992 à 2002), il a créé en 2007 l’Alliance pour la solidarité au Mali-Convergence des forces patriotiques (ASMA-CFP)
Secrétaire général de la présidence et Premier ministre du Mali (2017-2019), il a été le principal artisan de la réélection de feu le président Ibrahim Boubacar Kéita en 2018. Il a été aussi Directeur général de la sécurité d’Etat (DGSE) avant d’occuper plusieurs portefeuilles ministériels, notamment la Défense (à 2 reprises) et les Affaires étrangères. Journaliste au quotidien national du Mali, «L’Essor» et «Podium», ex-entraîneur de basket (Club Olympique de Bamako/COB) Soumeylou a été aussi Directeur technique national de la Fédération malienne de basket-ball (FMBB).
«En fait la mort nous laisse cette amertume et cette désolation commune mais aujourd’hui de façon particulière la mort de SBM me semble si injuste! Cet homme de son vivant, m’a toujours laissé un sentiment mitigé entre admiration et appréhension… Je n’étais pas une de ses partisanes, mais sa disparition me fait un mal de chien car j’ai le profond sentiment qu’elle n’aurait pas du être maintenant ! Cette mort plus que les autres est injuste», a réagi un cadre du pays, une jeune dame effondrée. Et une grande partie de la République doit ressentir aujourd’hui le même sentiment d’impuissance et de culpabilité qu’elle !
Va en paix le Tigre !
Puisse le Tout Puisse t’ouvrir largement les portes de son paradis Firdaws !
Moussa Bolly