La question de lhomosexualité dans les débats publics et populaires dans notre pays sest faite par le biais de faits divers, largement relayés par des médias, qui impliquaient une frange influente de lélite politique et économique du pays. La question longtemps considérée comme un tabou au Mali et en Afrique revient au cur de lactualité nationale.
Il nest pas facile de parler dhomosexualité. Particulièrement dans notre pays encore très à cheval sur certains principes fondateurs de la société malienne. Même dans les milieux a priori ouverts sur le monde extérieur : chercheurs, enseignants de lUniversité de Bamako, députés, citoyens dits « cultivés », on évite soigneusement la question.
Et pourtant, elle est là à nos portes. Même si Bamako nest pas lEurope, des symboles impies de la fornication dont parle la Bible, lhomosexualité existe bel et bien dans les Pays aux civilisations anciennes. Dans une société démocratique, la meilleure façon de traiter les problèmes, cest den parler.
Dans les années précédentes, au Mali, la minijupe était bannie et les filles qui la portaient étaient très mal vues. Un arrêté ministériel sous la première et repris sous la deuxième République lavait frappée dinterdiction. Cette décision na pas connu dabrogation jusquà nos jours, mais elle nexpose plus la femme en minijupe à la vindicte populaire. La société évolue et les murs avec. Même si nous convenons que les deux problèmes ne se situent pas au même niveau.
Un homme peut-il aimer son camarade garçon ?
La question vaut aussi pour la femme qui aimerait une autre femme. Dans une société où la sexualité est réservée à la reproduction, donc à la pérennisation de lespèce, lhomosexualité ne peut être acceptée. Elle signifierait stérilité et mort de lespèce humaine. Pour linstant, le plaisir nest pas le but premier de lacte sexuel, cest un adjuvant.
Au-delà de la révolte pour lhomosexualité, il y a un acte de conservation, de préservation. Cest ainsi que Lassina Sidibé, qui se fait appeler Sadio, aborde le sujet, en affichant dentrée de jeu des arguments hautement judéo-chrétiens Cheveux noirs coupés à ras, moustache et barbe, superbement taillées, forment une couronne autour de sa bouche.
Le rejet de la société :
« Je pense quil faut enfermer tous ces homosexuels. Ce sont des malades. Tout député ou ministre malien, qui osera voter une loi afin que notre société reconnaisse lhomosexualité, fera une insulte au genre humain », explique Moussa Sidibé étudiant à la Fast.
Pour Dieudonné, élève, les homosexuels sont des malades qui, à force de copier le Blanc, deviennent moins que des animaux. « Ils ont perdu la raison. Les animaux sont encore mieux que ces personnes, car je nai jamais vu deux chiens ou deux chattes saccoupler. Les rapports quils entretiennent sont des actes contre nature quil faut réprimer avec la dernière énergie ».
Pour certaines personnes, lhomosexualité est le résultat de la dégradation des murs face à un système éducatif destructeur qui nexalte pas les valeurs de notre société traditionnelle et ne fait que pousser les jeunes à consommer aveuglement tout ce qui vient de lOccident.
« Chaque citoyen doit assumer sa part de responsabilité par rapport à ce phénomène, sinon cela sera un désastre pour notre société et ce, lorsque ces homosexuels profitant de la tolérance et de lindifférence, vont commencer à réclamer des droits », affirme M. T.
Selon un sociologue, à travers lhistoire et les civilisations, cette pratique sexuelle a été diversement traitée, parfois valorisée culturellement, souvent détestée et condamnée. « Comme toutes les minorités, les homosexuels ont été traités tout au long de lHistoire au gré des idéologies, des peurs et des fantasmes, des intérêts surtout de la majorité dominante », conclut-il.
Adama Diabaté