À Bamako, la colline Koulouba est surnommée la «colline du pouvoir». Elle domine une ville campagnarde passée de 100 000 à 1 800 000 habitants en un demi-siècle. Depuis les vérandas de la résidence du président, on aperçoit, de l’autre côté du fleuve Niger, la colline Badala, appelée la «colline du savoir».
D’une altitude beaucoup plus modeste, la butte abrite la cité universitaire et ses étudiants désœuvrés. Privés de cours par une grève des professeurs, ils tournent en rond sur le campus depuis plusieurs mois. «On fête nos cinquante ans d’indépendance et de développement. Mais quel développement et quelle indépendance ? Nos parents allaient à l’école primaire des Blancs. Nous allons à l’université, mais nous maîtrisons mal notre langue officielle, le français», constate Soumaïla, un étudiant en droit.
«L’université nous apprend surtout à devenir des corrompus et des voleurs. Les profs sont comme nos dirigeants : les bons résultats s’achètent ou s’obtiennent par complaisance. Il y a aussi les notes sexuellement transmissibles, les NST, pour les filles», poursuit-il. Ses amis éclatent de rire. Bintou, une étudiante en gestion, hausse les épaules. «On n’a fait que de petites choses pendant ces cinquante ans», tranche-t-elle pour revenir au sujet. L’avenir ? «Il est incertain. Les diplômes vont servir à décorer les murs. On est dans l’impasse, alors les commémorations on s’en fiche», tranche la jeune fille.
Plongé dans le marasme, le pays dépend, pour une grande part, de l’aide extérieure qui représente 30 % des dépenses courantes de l’État. Poussés par les difficultés, quatre millions de Maliens vivent à l’étranger, en Afrique et en Europe. Quant à la corruption, elle se développe à une vitesse galopante en toute impunité malgré les rapports édifiants du bureau du Vérificateur général, un organisme de contrôle.
FIG
L’ Indicateur Renouveau 03/03/2011