Il s’agit de l’Alliance patriotique pour la souveraineté du Mali (APSM), le Collectif des Maliens de France pour la paix (CMFPaix) et le Mouvement pour la dignité et le droit des Maliens (MDDM). C’était un parcours marathon accompli avec le doyen du foyer de Rue Bara, M. Adama Diawara, 82 ans. Le jeu vaut la chandelle. Plus de cinq mois, les régions de Tombouctou, Gao et Kidal ont été agressées et occupées par des bandes criminelles : Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), Ansar Eddine, Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’ouest (Mujao) et Boko-Haram. Il s’agit d’intégristes criminels, bouffis de « haram » (chose illicite défendue par l’islam) issus de rançons et du narcotrafic, avec leur charia dans une « sale gueule » barbue, pour imposer leur volonté à une population qui n’aspire qu’à la paix. Quelle imposture !
Non aux intégristes, non à la charia !
L’itinéraire partait de l’ambassade du Mali à Paris au 89 Rue Cherche Midi dans le 6ème arrondissement de Paris pour aboutir au 159 boulevard Haussmann dans le 8ème devant l’ambassade du Burkina Faso, soit 6 km. Près de 1500 marcheurs, des Maliens, des amis du Mali (des Français, Sénégalais, Congolais, Algériens, Marocains, des Mauritaniens….) des femmes et des hommes des plus petits sur les épaules de leurs parents aux plus grands, la crème du monde des artistes maliens de France, Toumani Diakité alias Tom, Habib Dembélé le Guimba National et son épouse Fantani Touré, Askia Modibo, des responsables associatifs, des militants et simples citoyens dévoués pour leur patrie en danger, tous étaient là. L’ambiance était à la hauteur de l’événement au rythme des sons de tam-tam sous un soleil de plomb. Pendant que des dizaines de drapeaux aux couleurs éclatantes du Mali (vert, jaune rouge) palpitent dans les airs, les slogans étaient fièrement affichés, voire exhibés. Des slogans scandés en chœur sur tous les tons, tels des cris de détresse, d’indignation et de révolte : « APSM, CMFPaix, MDDM, Grande marche pour dénoncer les relations ambiguës du président du Burkina Faso avec le MNLA », « Le médiateur de la Cédéao Blaise Compaoré = Mnla = Mujao », « Oui à la Cédéao, Non à la gouvernance du Mali par la Cédéao », « Grande marche pour : Non à toute négociation avec les 5 Bandes Criminelles », « Non aux intégristes, Non à la Charia », « Le Mali : Un Peuple-Un But-Une-Foi : n’est pas négociable ! », « Les Femmes maliennes de la diaspora et d’Afrique disent : Non aux exactions perpétrées dans le Nord du Mali, Non aux viols et l’humiliation, Non aux casses des écoles, des hôpitaux et des maternités, Non à la Barbarie ! Non à la charia ! Trop c’est trop, on en a marre ! », « MNLA, Ansar dine, Aqmi, Mujao, Boko haram, Al Qaïda, Tous Dehors » « Dehors les envahisseurs criminels, Pour la Paix au Mali ».
Aucune négociation avec les criminels !
A 14h30 après le chant de l’hymne national, M. Ismaël Touré a lu la motion d’interpellation du gouvernement malien. Nous disons à notre Président de la république, affirme t-il, qu’il y en a marre de l’attentisme et de la passivité, de son Gouvernement et de l’Armée, réduits en de simples spectateurs, impuissants servant de caisse de résonnance aux actes odieux des bourreaux sans foi ni loi ! « Disons non à toute forme de négociation avec ces bandes criminelles et terroristes du MNLA et de ses alliés. Qu’elles soient maliennes ou étrangères, elles ont toutes délibérément et farouchement perpétré des crimes odieux contre le Peuple et l’Etat maliens. Car ces bandits doivent répondre de leurs actes devant la Cours Pénale Internationale. », a-t-il ajouté. A l’issue de la lecture de la motion, celle-ci a été remise en main propre à son S.E. M. Aboubacar Sidiki Touré, ambassadeur du Mali à Paris. Après avoir remercié les marcheurs pour le sens de leur combat, à savoir la paix et la restauration de l’intégrité territoriale de notre pays, il a promis de transmettre la motion aux plus hautes autorités. Les marcheurs ont ensuite mis le cap sur l’ambassade du Burkina Faso, sur 6 km en traversant tout le cœur de Paris de part et d’autre de la seine. La chanteuse Fantani Touré a chanté tout le long du parcours des chants à la gloire d’un Mali éternel sous le regard admiratif et les vivats de certains parisiens installés sur les terrasses de cafés. Après plus de trois heures de marche, le cortège est arrivé devant l’ambassade du Burkina Faso.
Blaise Compaoré, complice des criminels MNLA
Ici la motion a été lue par M. Sangaré Charly. Etant un pays souverain et indépendant, rappelle t-il, membre fondateur de la Cédéao ayant été agressé par des groupes armés rebelles et terroristes et son intégrité territoriale entamée, le Mali a certes, besoin de l’aide et du soutien des pays frères de la Cédéao, mais dans le respect de sa souveraineté et de son peuple. « Pour cela nous disons Oui à la Cédéao mais Non à la gouvernance du Mali par la Cédéao », a-t-il martelé. Ensuite M. Sangaré a indexé la position partisane et complaisante du médiateur Blaise Compaoré en faveur de l’organisation criminelle : le MNLA. Le MNLA est la première organisation instigatrice de tous les crimes odieux commis dans les régions de Gao, Kidal et Tombouctou avec l’appui de ses anciens alliés intégristes et terroristes. « Nous considérons que ce parti pris du grand médiateur de la Cédéao le disqualifie de fait à poursuivre une médiation sereine et trouver une bonne résolution menant le Mali à une sortie durable de cette crise. Ainsi, nous récusons la médiation trouble du président Blaise Compaoré et exigeons à cet effet, qu’il soit dessaisi du dossier malien, qui sera confié à un chef d’Etat neutre, crédible et consensuel de la sous-région » a-t-il ajouté.
Après le dépôt de la motion de protestation dans la boîte aux lettres de l’ambassade du Burkina Faso (car le personnel ayant décliné l’invitation), la marche a pris fin par l’hymne national et des bénédictions pour un Mali uni et apaisé. La seule fausse note a été le cas de malaise d’une sénégalaise, qui était venue soutenir les Maliens. Elle a été vite secourue par les pompiers de Paris. Le combat continue tant que le drapeau du Mali ne flottera pas sur les gouvernorats de Tombouctou, Gao et Kidal !
Correspondance particulière
Ils ont dit
MME AWA NIAMBELE :
« Je suis militante associative et politique, car je suis membre d’un parti politique que je ne nommerai pas ici, car c’est le Mali qui est en cause. Bon sang, où sont les hommes maliens, pour laisser leurs femmes, leurs enfants, violés, assassinés ? Alors messieurs, défendez-nous ! Défendez-nous ! Contre les mœurs rétrogrades des envahisseurs. Ce qui se passe actuellement dans le Nord du Mali n’a rien n’avoir avec la religion. Réveillez-vous ! Messieurs défendez-nous ! Les viols, ça suffit ! »
HABIB DEMBELE, ALIAS GUIMBA NATIONAL :
« Nous disons que ceux-là, les politiciens chercheurs de place, qui ne sont pas des patriotes convaincus ou qui sont des voleurs camouflés, qui sont simplement des chercheurs de place, quand nous parviendrons avec l’aide de la communauté internationale à récupérer l’intégrité territoriale du Mali, ils nous trouveront sur leur chemin. Vive le Mali ! »
LASSANA NIAKATE, PRESIDENT DE L’ASSOCIATION DES MALIENS DE MONTREUIL :
« Je pense que cette marche est légitime, pour dénoncer les prises de position du médiateur de la Cédéao, M. Blaise Compaoré. Car nous constatons une complicité énorme avec les envahisseurs du Nord du Mali. C’est tout à fait normal de dénoncer cet état de fait, afin que les autorités maliennes se ressaisissent pour enfin, mettre les points sur les « i », et obtenir un vrai médiateur ».
MME COULIBALY RAMATA MAÏGA :
« L’organisation de cette marche, c’est la continuité de toutes les actions de mobilisation que nous avons entreprises depuis le 17 janvier 2012. Nous n’avons pas baissé les bras, nous continuerons ce combat tant que le Mali n’est pas libéré. Le Mali fait 1.240.000 km2 que nous ont laissés nos parents, nos grands parents. Il est inadmissible pour nous Maliens de laisser un centimètre carré à qui que ce soit. Donc notre combat ira jusqu’au bout. On a bien dit « Un Peuple », le peuple malien a toujours été soudé. Le peuple malien à travers tout ce qui a été bâti jusque là (l’union, la solidarité, la compréhension), ne peut être détruit d’un coup. Un But, le but du Mali, c’est la prospérité du Mali, c’est l’intégrité territoriale du Mali, c’est le développement du Mali. Une Foi, la foi, c’est, ce que nous pouvons construire ensemble. La foi, c’est cet amour entre les Maliens, ça c’est la foi que nous ont léguée nos grands empires, que nous ont léguée Soundjata Kéita, Firhoun, El Hadj Oumar Tall, Babemba, j’en passe, et que nous a laissé bien sûr le premier président du Mali, Modibo Kéita. Je suis une fille de Modibo Kéita, notre grand président, qui a passé tout son temps à bâtir l’union des Maliens. J’ai un cri de cœur : c’est que les femmes ont été mises à l’écart par rapport aux négociations et à la gestion de la crise. Il n’y a que quatre femmes dans le gouvernement dit, d’union nationale. Nous, les femmes, nous sommes également capables de participer à la résolution des crises au Mali et dans le monde entier ».
ADAMA DIAWARA, DOYEN DU FOYER RUE BARA :
« J’ai 82 ans. On a plus besoin de manifestations. Il faut agir ! 15 millions de personnes contre une poignée de quelques 300 personnes. On n’a pas besoin de la Cédéao, ni des français, ni des américains. C’est à nous [Maliens, ndlr] d’aller nous battre ! A vous la jeune génération montante, de vous battre. Nous, nous avons fait notre temps ? C’est à vous de faire le vôtre. Pour parler de l’histoire de cette guerre dans le nord du Mali, elle date de 1958. Lorsque De Gaulle a donné l’indépendance aux africains, le roi Idriss de la Libye a armé les Touaregs en disant qu’il ne faut pas que les Kidas-Kidas, les Kaoulousses, c’est-à-dire ceux qu’il considère comme étant des esclaves, ne les commandent. Alors De Gaulle, en tant que président de la République française a dit aux Touaregs, pas un centimètre de la terre du Soudan (à l’époque ce n’était pas le Mali) ne vous sera cédé. Les Touaregs ont eu peur. Ils ont attendu jusqu’à ce que Modibo Kéita arrive au pouvoir. La guerre a commencé, lorsque Modibo Kéita arriva au pouvoir en 1960. Modibo les a tués. Après Moussa Traoré les a également anéantis et c’était fini. Ensuite le président Alpha Oumar Konaré est venu avec sa médiation. A l’époque il y avait un embargo sur la Libye sous Khaddafi. Il y est allé comme intermédiaire. Après l’embargo, il est venu allumer, la flamme de la paix. A cause de cette flamme de la paix, le Mali se trouve aujourd’hui, excusez-moi l’expression, dans la merde. Ce sont les présidents Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré qui ont échoué dans la gestion de cette crise dans le Nord du Mali. On récolte ce que l’on a semé. Ils vont récolter ce qu’ils ont semé. On va les juger » !
TOUMANI DIAKITE ALIAS TOM, ARTISTE, CHANTEUR, COMPOSITEUR :
« Où que les maliens se trouvent, il faut qu’ils se mobilisent. Le pays a besoin de retrouver son intégrité territoriale. On est envahi par des bandits, des voyous qui nous pourrissent la vie. Le Mali est un pays laïc. Ce pays est aujourd’hui menacé par des vendeurs de drogue, des narcotrafiquants, par des imbéciles, on ne sait même pas d’où ils viennent. Ils terrorisent nos populations. Il faut que les Maliens se retrouvent, car notre pays a besoin de la paix. Que le Mali se retrouve en paix avec ses fils ».
MAMADOU DIAKITE, COMMUNICATEUR :
« La laïcité du Mali a commencé en l’an 703. Quand les premiers émissaires sont venus du monde arabe, nous étions dans l’empire du Ghana. Nous avons appris, rapporte t-ils, qu’il y a un peuple au sud du Sahara, très fier, un peuple très heureux, et nous aurons bien voulu apporter à ce peuple, notre religion. L’empereur Kaya Makan Cissé, leur a répondu, vous êtes les bienvenus, et c’est moi-même qui vous accueille. Mais moi je ne peux adhérer à votre religion, car moi je détiens le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel. Je suis à la fois le temporel et le spirituel. Mais allez-y, voici le peuple, ceux qui y adhéreront à votre religion seront les vôtres et ceux qui n’adhéreront pas, seront avec nous. Donc la laïcité du Mali a commencé il y a plus de 1000 ans avec l’empire du Ghana. Alors qu’on ne vienne pas nous raconter des histoires aujourd’hui. Les Almoravides sont venus piller ce même empire du Ghana, alors que l’islam y était pratiqué. Mais qu’à cela ne tienne, chaque fois que le Mali a été envahi, le Mali a été libéré par les Maliens ».
HAMSATOU MAÏGA, RESSORTISSANTE DE GAO.
« J’appelle de tous mes vœux, que Gao, Tombouctou et Kidal soient libérées, le plus rapidement possible. On ne se reconnaît pas du tout dans la charia que les intégristes veulent nous imposer ».
MAHAMADOU CISSE, VICE- PRESIDENT DU CONSEIL DE BASE DES MALIENS DE FRANCE (CBMF) :
« Je pense que c’est encourageant. Car depuis six mois la crise a commencé et malgré tout il y a autant de monde mobilisé pour cette cause juste, à savoir l’intégrité territoriale de notre pays. Les violations de droits de l’Homme dans le Nord de notre pays et tous les drames humains que nous avons dénoncés à maintes reprises, sont là pour motiver les gens. Voyez-vous, autant de monde dans les rues de Paris un dimanche, surtout sur un itinéraire entre l’ambassade du Mali et l’ambassade du Burkina Faso, c’est quitter Bamako pour aller à Kati à pieds. Cela signifie simplement que les Maliens de France sont déterminés et ils veulent en même temps transmettre cette énergie aux maliens de l’intérieur. Parce qu’on ne sent pas les Maliens de l’intérieur aussi motivés pour défendre ce pays que nous aimons tant. Mon impression est que sous ce soleil ardent où on entend le tam-tam, on entend des slogans, il y a encore de l’optimisme. La mobilisation doit continuer et nous pousserons les décideurs à agir conformément à notre volonté ».
L’ARTISTE ASKIA MODIBO, MUSICIEN, CHANTEUR :
« Nous sommes là aujourd’hui en plein cœur de Paris, pour manifester notre mécontentement, notre désaveu vis-à-vis de la situation de crise dans notre pays. Le nord de notre pays est occupé par des bandits armés, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux. Cette situation concerne non seulement le Mali, mais aussi toute la sous-région. Il est temps que l’on se lève pour se donner la main afin de bouter hors de nos frontières ces islamistes, ces narcotrafiquants qui sont en train de semer la terreur sur notre population dans le Nord de notre pays. Nous voulons la paix, nous ne voulons pas la guerre. Nous voulons que notre pays le Mali, Un-Peuple-Un-But-Une-Foi, retrouve son intégrité territoriale ».
MME THERESE-MARIE DEFFONTAINES, ANCIENNE JOURNALISTE DU JOURNAL LE MONDE :
« Je suis vraiment triste. Je trouve que le Mali est dans un état dramatique, qu’il faut faire savoir, le dire pour réclamer un changement. Ce n’est pas à moi de décider comment ? Justement au moment où le président intérimaire [M. Dioncounda Traoré, ndlr] a demandé l’appui de la Cédéao et réclamé, en étant nombreux ici pour dire, d’accord il faut intervenir, si c’est nécessaire. Mais que cela ne soit pas une prise de pouvoir de la Cédéao sur le Mali dans l’état où il est. Je pense que par rapport à çà, il aurait été important que les Maliens soient sortis en nombre plus important ».
ELIZABETH DIAKITE :
« Tout le Mali pleure, on n’est sous le choc ! Je voudrai vraiment la paix pour le Mali, pour qu’un jour je puisse mettre un pied au Mali pour notre avenir et surtout pour notre culture. Nous comptons sur nos parents, nos frères, et surtout sur vous [les médias, ndlr] ».
ABDOUL KARIM SYLLA, UN DOYEN DE LA DIASPORA MALIENNE DE FRANCE :
« Je pense que la manifestation est un succès. Mon souhait est que l’on parvienne à atteindre notre objectif, c’est-à-dire la libération des régions occupées. La solution idoine est la solution arrêtée par la Cédéao. Car étant donné que le Mali, seul n’est pas à même de juguler la crise. Ce n’est pas du tout une honte que d’avoir recours à l’aide du monde extérieur pour nous en sortir. Est-ce que pendant la seconde guerre mondiale, la France seule s’est débarrassée d’Hitler ? Non ! Alors pourquoi les Maliens ne peuvent pas se mettre d’accord et mettre de côté l’orgueil mal placé, des considérations totalement abjectes afin d’avoir comme seul objectif, libérer le pays ? »
ALLASSANE TOURE, PRESIDENT DE LA COORDINATION DES RESSORTISSANTS DU NORD DU MALI EN FRANCE ET ANCIEN COMBATTANT GHANDA KOYE :
« Pour moi, la manifestation est un succès. Cette manifestation, c’est pour exprimer notre indignation par rapport à M. Blaise Compaoré qui a pris position dans sa médiation, de manière plus ou moins officielle concernant le MNLA et Ansar Eddine. Donc la première solution c’est dessaisir Blaise Compaoré de la médiation car, il est en train d’organiser, d’armer des bandits contre le Mali. Il a envoyé un avion pour récupérer un bandit. Il a organisé une rencontre MNLA au Burkina Faso. D’autre part, pour nous il n’y a pas de négociations avec des bandits armés qui cherchent à diviser le pays ».
Correspondance particulière
L’indicateur du renouveau 17/09/2012