le retour de la crise énergétique, démarrée par une panne de vent en mer du Nord et exacerbée par la guerre en Ukraine, fait ressurgir d’un coup un passé que l’on croyait révolu. Elu sur la promesse d’une accélération de la lutte contre le réchauffement climatique, le président des Etats-Unis, Joe Biden, se retrouve contraint à exhorter les pétroliers américains à produire plus au pays. De ce côté de l’Atlantique, le premier ministre britannique, Boris Johnson, qui, il y a deux mois, présentait son pays comme l’Arabie saoudite de l’éolien, parle désormais de relancer la production de pétrole en mer du Nord. Et, enfin, en France, après une décennie de désintérêt pour le nucléaire, on se reprend à imaginer un futur pour cette énergie maudite.
Ce mercredi 9 mars, le gouvernement a lancé un appel à projets doté de 500 millions d’euros pour financer la recherche sur le nucléaire du futur, dans le cadre de son plan France 2030. Un mois auparavant, le président de la République, Emmanuel Macron, avait annoncé la construction prochaine de six nouveaux réacteurs de type EPR avec une extension possible à huit exemplaires de plus. Aucune de ces deux décisions, sur la recherche et sur les réacteurs, ne répondra à la crise actuelle, puisque le premier des six nouveaux EPR ne sera pas en fonction avant 2035.
Surcoûts abyssaux
Mais elle trace un avenir bien différent de celui d’un désengagement progressif de cette technologie et elle met surtout en évidence un paradoxe inconfortable. La France est le pays le plus nucléarisé du monde, 70 % de son électricité provient de cette source, et l’un des moins bien préparés pour affronter l’avenir. Engluée dans les reports sans fin et les surcoûts abyssaux du chantier de Flamanville (dix ans de retard et une facture finale de près de 19 milliards d’euros), elle a baissé la garde sur le futur, refusant d’admettre que la technologie de l’EPR taille XXL n’est pas une solution d’avenir.
Philippe Escande
Source: le monde