La pression augmente encore d’un cran contre Laurent Gbagbo. Ce mercredi 22 décembre, Guillaume Soro, Premier ministre du président reconnu par la communauté internationale Alassane Ouattara, appelle cette même communauté internationale à déloger par la force le chef de l’Etat proclamé par le Conseil constitutionnel ivoirien. Ce mercredi matin, la Banque mondiale a, de son côté, annoncé que les financements destinés à la Côte d’Ivoire sont gelés.
Les accès routiers étant toujours bloqués, c’est par les airs qu’une vingtaine de journalistes ont pu se rendre, ce mercredi, à bord d’un hélicoptère de l’Onuci à l’hôtel du Golf. Sur place, il n’y a plus la foule d’antan mais le siège de la présidence Ouattara et du gouvernement Soro est toujours protégé par plusieurs blindés blancs des Nations unies.
Si Alassane Ouattara reste pour l’heure muet, c’est son Premier ministre qui assure le service avec la presse. Pour Guillaume Soro, l’offre de dialogue de Laurent Gbagbo est nulle et non avenue. La proposition de faire venir en Côte d’Ivoire un comité d’experts dirigé par l’Union africaine est inacceptable. Selon le Premier ministre d’Alassane Ouattara, qui est également le chef des Forces nouvelles, Laurent Gbagbo doit quitter le pouvoir et la mobilisation des Ivoiriens doit se poursuivre.
Quant à la manière d’envisager le départ de Laurent Gbagbo, Guillaume Soro ne semble plus croire à l’option diplomatique et, pour lui, l’utilisation de la force est désormais la seule option viable. Selon le Premier ministre d’Alassane Ouattara, les Forces nouvelles pourraient participer à une action militaire. Mais pour lui, c’est avant tout à la communauté internationale de mobiliser des troupes pour déloger Laurent Gbagbo du fauteuil présidentiel.
Rappelons que mardi soir à la télévision nationale ivoirienne, Laurent Gbagbo a réaffirmé qu’il est le président de la Côte d’Ivoire, selon les résultats annoncés par le Conseil Constitutionnel. Il accuse le camp Ouattara et ses soutiens de lui « faire la guerre ». Mais il se dit prêt au dialogue et prêt à accueillir un comité d’évaluation sur la crise post-électorale qui aurait pour mission de trouver une issue pacifique.
La Banque mondiale gèle ses financements à la Côte d’Ivoire
Quelques heures plus tôt, le patron de la Banque mondiale, l’Américain Robert Zoellick, était à Paris pour une réunion de travail avec le président Nicolas Sarkozy consacrée aux grandes réformes que la France souhaite initier durant sa présidence du G20. Mais la situation en Côte d’Ivoire a largement éclipsé les débats. Sans compter que c’est la première fois que le président de l’institution financière s’exprime publiquement sur la crise dans ce pays.
Robert Zoellick a ainsi confirmé que la Banque mondiale, qui vient de fermer son bureauà Abidjan, a gelé tous ces financements à la Côte d’Ivoire. Une démarche qui, selon lui, a été appuyée par les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), qui ont décidé eux aussi de geler tous les crédits octroyés à Abidjan. Le patron de la Banque mondiale a en effet affirmé avoir évoqué cette question, il y a quelques jours, lors d’une rencontre avec le président Malien Amadou Toumani Touré dont le pays préside actuellement l’Uemoa.
Mais ce qui inquiète aujourd’hui le plus Robert Zoellick, ce sont les conséquences économiques de cette crise dans toute la sous-région. Il a notamment rappelé que la Côte d’Ivoire est un partenaire majeur pour de nombreux pays et que son institution en coordination avec la banque africaine de développement suit de près l’évolution de la situation.
Le patron de la Banque mondiale a d’ailleurs évoqué ce dossier avec Nicolas Sarkozy. Les deux hommes ont appelé les institutions financières internationales et les partenaires au développement de la Côte d’Ivoire à jouer un rôle plus accru pour tenter de trouver une solution à cette crise.
L’Angola pour la non-ingérence
Dans ce concert de pressions internationales contre le régime de Laurent Gbagbo, l’Angola a, selon l’AFP, prôné ce mercredi une politique de « non ingérence de la communauté internationale dans les divergences électorales en Côte d’Ivoire », a déclaré mercredi le ministre angolais des Affaires étrangère Jorge Chicote, au cours d’une visite à Bissau. « L’Angola a une position qui est le respect des institutions de la République de Côte d’Ivoire, la non ingérence extérieure et l’adoption d’une posture qui éviterait un bain de sang en Côte d’Ivoire », a souligné le chef de la diplomatie angolaise, à sa sortie d’une audience avec le président bissau-guinéen Malam Bacai Sanha.
Rfi le 23/12/2010