Il faudra encore une adoption formelle sous 48 heures par les Etats membres de l’UE, mais la décision des experts des 27 à Bruxelles a été officiellement confirmée par les services de la Haute représentante pour la politique extérieure de l’Union, Catherine Ashton.
Cela va dans le droit fil des menaces proférées à l’encontre de Laurent Gbagbo lors du sommet européen vendredi 17 décembre. L’UE a donc mis à exécution son ultimatum en plaçant le président sortant sur la liste des Ivoiriens visés par les sanctions. Il s’agit, pour rappel, du gel des avoirs en Europe et de l’interdiction de visa pour le territoire de l’Union.
Le principe de ces sanctions avait été décidé il y a une semaine, mais depuis la liste était toujours en préparation. Les Européens avaient décidé d’attendre jusqu’à ce lundi pour la publier, apparemment à la demande de la France qui voulait laisser une porte de sortie « honorable » à Laurent Gbagbo. Certains comme les Britanniques et les Allemands auraient voulu voir son nom figurer immédiatement sur cette liste, mais, à la place, il avait été décidé de fixer au président sortant cet ultimatum en lui donnant jusqu’à ce lundi pour se retirer.
Sa femme, Simone Gbagbo est, elle aussi, visée par ces sanctions qui touchent encore dix-sept autres personnes dont son garde du corps. Ce sont tous des fidèles du président sortant, soit des politiques, comme le président du Conseil constitutionnel, soit des militaires ou des policiers comme le chef de la garde républicaine mais on trouve aussi le patron de la radio-télévision publique sur cette liste qui doit encore être communiquée dans le détail.
A Abidjan, on attend la décision du Conseil de sécurité
A Abidjan, en milieu de journée ce lundi, aucun incident grave ne nous a été rapporté. La ville est calme et d’après des habitants des communes d’Abobo et de Koumassi, à la différence des précédentes, il n’y a pas eu la nuit dernière de descente des forces de l’ordre. Si la vie suit son cours et que la presse proche de l’opposition, qui avait été suspendue vendredi, est à nouveau dans les kiosques, les Abidjanais vivent tout de même dans une réelle psychose. Beaucoup pensent que le pire est à venir pour les jours prochains.
En fait, ce lundi, la partie se joue très loin de la Côte d’Ivoire, de l’autre côté de l’Atlantique, à New York, où le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir pour discuter de l’avenir de l’Onuci. Contre la volonté de Laurent Gbagbo et de son gouvernement, les diplomates onusiens vont, selon toute vraisemblance, proroger le mandat des casques bleus et des forces françaises qui les appuient. En revanche, d’après nos informations, ce mandat ne devrait pas être renforcé, l’opération devrait continuer à avoir pour mission de protéger une paix bien fragile et non d’imposer la paix.
Quoi qu’il en soit, nul doute que la décision aura des répercutions sur le terrain. Depuis plusieurs jours, l’Onuci a de plus en plus de mal à circuler en ville et son patron parle désormais d’actes hostiles contre les forces impartiales. Le ministre des Affaires étrangères de Laurent Gbagbo, Alcide Djédjé, a déjà prévenu que le gouvernement auquel il appartient et les Forces de défense et de sécurité ne vont plus coopérer avec les casques bleus et les soldats de l’opération Licorne. Les mouvements de jeunesse proches de Laurent Gbagbo, eux, se préparent à des manifestations de rue. Des manifestations qui, disent-ils, seront pacifiques.
Le gouvernement Gbagbo dément des accusations d’ « exactions massives »
Le ministre de l’Intérieur de Laurent Gbagbo, Emile Guiriéoulou, a rejeté lundi les accusations de « violations massives des droits de l’Homme » en Côte d’Ivoire portées la veille par la Haut commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Navi Pillay,
«Nous rejetons ses accusations. C’est un rapport partisan», a déclaré à l’AFP le ministre Guiriéoulou. «Les violences de ces derniers jours ont fait près de 14 tués par balles dans le rang des Forces de défense et de sécurité (FDS) » fidèles à Laurent Gbagbo, a-t-il affirmé. « Et ceci on ne le dit pas assez ». A Genève, Mme Pillay avait affirmé dimanche dans un communiqué que les violences contre des partisans du rival de Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara, ont fait « ces trois derniers jours plus de 50 morts ». Elle a aussi dénoncé des « violations massives des droits de l’Homme », évoquant en particulier des enlèvements commis de nuit par des « individus armés non identifiés en tenue militaire», accompagnés par des soldats des FDS et miliciens fidèles à Laurent Gbagbo.
AFP
Rfi le 21/12/2010