Si la politique est considérée comme l’art de gouverner les individus qui composent la société humaine, la religion est perçue comme le processus, les valeurs qui nous lient à Dieu, ou du moins qui nous élèvent vers la perfection, tel que recommandé par Dieu.
De cet aspect définitionnel et conceptuel des deux terminologies, sans nul doute on retient une touche de valeurs immatérielles, fussent-elles morales. Du coup, on admet qu’entre la religion et la politique existe l’étape de la morale. Pour Platon, philosophe grec: «le trait d’union entre la politique et la religion, c’est la morale».
Qu’est-ce que c’est la morale? La morale est l’ensemble des règles naturelles immatérielles caractérisant la bonne conduite de l’individu dans la société. Contrairement à la règle de droit, qui est coercitive et dont la violation est juridiquement sanctionnée, la morale quant à elle renvoie à une question d’honneur, une conscience.
Quel est donc l’intérêt d’une telle analyse? La question nous renvoie à l’appréhension, sinon à l’appropriation, d’un débat politico-religieux en France ces derniers jours, où le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative, a censuré en annulation l’arrêté du Préfet de Villeneuve Loubet interdisant le port du burkini sur ses plages, estimant que le port du burkini n’était pas de nature à troubler l’ordre public et que cela était uniquement dû aux convictions religieuses.
A travers cette décision, le Conseil d’Etat a éclairé la lanterne de tous les peuples qui s’attachent aux valeurs de la coexistence pacifique des religions, bref au respect de la laïcité comme valeur fondamentale, inhérente aux libertés fondamentales de la République et de la démocratie.
Si chacun demeure libre de pratiquer sa religion sans porter atteinte à la religion de l’autre ou à l’intégrité physique de la personne humaine, les Nations du monde vivront paisiblement leur religion, avec une liberté d’aller et de revenir dans la plus grande quiétude. L’une des valeurs essentielles de la religion, c’est la tolérance, la paix, l’acceptation de l’autre en tant créature divine sacrée.
L’inscription du principe de la laïcité dans les dispositions constitutionnelles constitue un acte hautement politique, car protecteur des libertés fondamentales en matière de convictions religieuses. Elle constitue aussi (l’inscription) un acte à valeur religieuse, car l’être humain est, par essence, un être religieux, attaché à Dieu consciemment ou inconsciemment.
L’Etat de droit n’est rien d’autre qu’un Etat où les droits objectifs et subjectifs sont juridiquement reconnus et protégés et où l’Etat lui-même est soumis au droit. Dans cet esprit, comme le disait Rousseau, nul n’est assez fort pour s’extirper du droit, car la force est remplacée par le droit.
Le Conseil d’Etat vient de donner un signal fort dans la préservation des libertés fondamentales et le respect du principe de laïcité. Il n’a jamais d’ailleurs rompu avec cette jurisprudence protégeant la laïcité considérée comme un fondement important de la République et de la démocratie.
En effet, chacun est libre de vivre ses convictions religieuses, mais dans la limite stricte de celles des autres. Le monde a besoin de paix, de stabilité, pour que les hommes vivent heureux. La religion, qui est un facteur de paix, ne doit pas se substituer à la paix avec l’émergence nébuleuse et aveugle du fondamentalisme religieux ou du terrorisme.
Au moment où le Conseil d’Etat tranche, en l’espèce en respectant les convictions religieuses, consacrant une fois de plus le principe de laïcité comme principe irréversible de la démocratie, les Nations civilisées, les démocrates et les républicains doivent comprendre que pareille de décision mérite d’être saluée. Seule la coexistence pacifique des religions renforce la cohésion sociale.
Souleymane Sanogo, Analyste, Juriste, sanogosoul@y