La présence de certains leaders du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) au grand rassemblement du M5-RFP à la Place de l’Indépendance vendredi dernier (21 août 2020) n’a pas manqué de susciter des inquiétudes. Et cela d’autant que les Colonels Diaw et Wagué semblaient réellement prendre goût au bain de foule. Inquiétant pour qui sait que c’est dans des circonstances pareilles qu’on contracte le virus du populisme conduisant à la fatale ivresse du pouvoir.
«Nous sommes contents d’être avec vous cet après-midi. Nous remercions le peuple malien. Notre travail a été de parachever votre combat», a avoué le Colonel-major Ismaël Wagué, porte-parole du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) qui a participé au grand rassemblement du Mouvement du 5 Juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) du vendredi 21 août 2020 en compagnie du Colonel Malick Diaw.
Cette présence est une erreur qui entache leur neutralité face à la classe politique. Certes comme la martelé Dr Choguel Kokala Maïga, «les FDS (Forces de défense et de sécurité) se sont interposées pour éviter à notre pays un bain de sang et pour retrouver la voie de la dignité et de l’honneur qu’elle n’aurait jamais dû quitter». Mais, ce n’est pas une raison de s’afficher ou de flirter avec une composante de la classe politique aussi compromise par sa mauvaise gouvernance que toutes les autres. Et surtout que nos jeunes officiers ne se trompent pas, la foule que le M5-RFP a mobilisée quatre fois sur la Place de l’Indépendance ne représente pas le 1/10 du peuple pour le «Salut» duquel ils ont mis fin au pouvoir Ibrahim Boubacar Kéita, en l’empêchant donc de finir le mandat que ce même peuple lui a confié.
Nous pensons que la visite discrète rendue à l’Imam Dicko à son domicile au lendemain du putsch était déjà assez compromettante pour ne pas être suivie d’une si grosse erreur. Et la manière dont les représentants de la junte semblaient savourer le bain de foule ne peut que susciter l’inquiétude à leur sujet. Tomber dans le populisme comme un certain Amadou Haya Sanogo serait une grosse erreur qui ne peut que les mettre à la merci des politiciens et autres vampires qui ne se nourrissent que du sang du peuple.
Une image qui n’est aussi sans rappeler un certain Comité militaire de libération nationale (CMLN) du jeune Lieutenant Moussa Traoré communiant avec la foule en novembre 1968 après avoir renversé Modibo Kéita ; où du Comité de transition pour le Salut du peuple de la République du Mali (CTSP) à la Bourse du Travail dans l’euphorie de la chute du Général Moussa Traoré. Et surtout que nous savons aussi que, comme le CNSP, tous les précédents putschistes se réclamaient «libérateurs» ou «salvateurs». Raison de plus pour le peuple malien d’ouvrir l’œil et à sortir de l’euphorie ambiante de la promesse d’un nouveau départ pour le Mali. Que nos jeunes «sauveurs du peuple» sachent surtout que le populisme est le terreau de l’ivresse du pouvoir qui détourne toujours des nobles ambitions du départ.
La junte doit afficher ses distances vis-à-vis aussi bien des leaders politiques (opposition et majorité), que des leaders religieux. Il ne faut pas surtout qu’elle soit tentée de remettre le M5-RFP en selle en lui manifestant une quelconque reconnaissance pour avoir créée les conditions de leur coup d’Etat. Désormais, les relations du Colonel Goïta avec l’Imam Mahmoud Dicko sont connues de tous puisque ce dernier aurait été l’artisan de sa libération des geôles du MNLA en 2012. Que nos valeureux officiers n’oublient jamais que tout deal avec un politicien malien ou la classe politique malienne s’avère toujours par la suite être une dangereuse et compromettante liaison généralement fatale aux militaires.
S’ils veulent réellement marquer l’histoire de ce pays de la façon la plus honorable que les leaders du CNSP tiennent la classe politique actuelle à distance car elle est à craindre comme la peste !
Hamady Tamba
IBK A PROPOS DES SANCTIONS DE LA CEDEAO
«Je ne retournerai pas aux affaires, même pas pour une seconde»
IBK, un grand homme dans l’âme qui fait encore valoir son amour pour le Mali à partir de sa «cellule» où il a reçu la délégation de la CEDEAO le samedi 22 août 2020. Appréciez plutôt !
«Je ne suis plus pour un rétablissement de ma personne à la tête de l’Etat malien, car ce serait une nouvelle violation de la constitution de mon pays. La rupture devrait entrainer une nouvelle élection à laquelle je ne participerai pas. Je suis sensible à l’attention que mes pairs n’ont cessé de porter à mon pays depuis quelques temps. Sans rentrer dans les détails du coup de force militaire, j’ai toujours dit qu’on est président, on n’est jamais un bon président, car la voix des peuples portent plus loin que nos capacités d’actions. Il ne reste qu’a un chef d’Etat l’honneur et la dignité, ma décision est donc prise en toute conscience et liberté : je renonce à mes fonctions. Que nul ne fasse violence sur le peuple malien afin de satisfaire des ambitions autres que les actes clairement posés par mes soins. Je ne retournerai pas aux affaires, même pas pour une seconde. Toutefois, je vous suis reconnaissant, je vous remercie».
Ibrahim Boubacar Kéita