Le « général-diplomate » Colin Powell, premier secrétaire d’Etat afro-américain à la réputation entachée par son soutien à l’intervention en Irak, est décédé lundi à l’âge de 84 ans de « complications liées au Covid-19 ».
« Nous avons perdu un mari, un père, et grand-père remarquable et aimant, et un grand Américain », a déclaré sa famille dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, précisant qu’il était « entièrement vacciné ».
Il souffrait par ailleurs d’un myélome multiple, une forme de cancer du sang qui affecte le système immunitaire, selon des médias américains. Les personnes immunodéprimées sont plus vulnérables face au Covid-19.
Colin Powell est mort à l’hôpital Walter Reed, situé dans la banlieue de Washington, où sont souvent soignés les présidents américains.
Il a été le premier Afro-Américain et l’homme le plus jeune à occuper le poste de chef d’état-major des armées, de 1989 à 1993, avant de devenir le premier secrétaire d’Etat noir sous la présidence républicaine de George W. Bush.
L’ancien président républicain a salué la mémoire d’un « grand serviteur de l’Etat », « très respecté dans son pays et à l’étranger », dans un communiqué.
Le président Joe Biden a lui déclaré que l’ex-secrétaire d’Etat représentait « les idéaux les plus élevés de la diplomatie et de l’armée » et était « attaché avant tout à la force et la sécurité de la nation » américaine.
« Le monde a perdu l’un de ses plus grands hommes », a dit le ministre américain de la Défense Lloyd Austin, tandis que le chef de la diplomatie Antony Blinken affirmait que Colin Powell n’avait « jamais cessé de croire en l’Amérique ».
En Israël, l’ex-Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre des Affaires étrangères Yaïr Lapid ont salué un « ami » de l’Etat hébreu.
Colin Powell était « une figure marquante du commandement militaire et politique américain » et « quelqu’un d’extrêmement compétent et intègre », a souligné Tony Blair, ancien Premier ministre du Royaume-Uni pendant la guerre en Irak.
– Guerre en Irak –
Modéré de tempérament, M. Powell a bataillé pour faire valoir son point de vue de paix face aux « faucons » de l’administration Bush, comme le vice-président Dick Cheney ou le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, très « va-t-en-guerre » après les attentats meurtriers du 11 septembre 2001.
C’est au sujet de l’Irak que les tensions avaient atteint leur paroxysme. Mais, fidèle à George W. Bush, le secrétaire d’Etat n’avait rien laissé paraître, défendant sans état d’âme apparent la politique suivie.
M. Powell avait fait, le 5 février 2003 devant le Conseil de sécurité de l’ONU, une longue allocution sur les armes de destruction massives prétendument détenues par l’Irak, des arguments qui ont servi à justifier l’invasion du pays. Il avait notamment agité une fiole contenant selon lui de l’anthrax, image restée célèbre.
Il a admis par la suite que cette prestation était une « tache » sur sa réputation: « C’est une tache parce que je suis celui qui a fait cette présentation au nom des Etats-Unis devant le monde, et cela fera toujours partie de mon bilan. »
« Sa politique ratée a conduit à la destruction de l’Irak » et « nous sommes retournés dans le passé à cause d’elle, malheureusement », a déclaré à l’AFP en réaction à son décès Amin Ahmed, un Irakien de 53 ans, depuis Bagdad.
Colin Powell n’avait pas hésité à prendre ses distances avec le parti républicain, soutenant par exemple en 2008 la candidature du démocrate Barack Obama, qui allait devenir le premier président noir des Etats-Unis.
Il avait annoncé en 2020 qu’il voterait pour Joe Biden, en dénonçant les « mensonges » de Donald Trump, après avoir déjà voté Hillary Clinton en 2016.
« Je n’aurais jamais utilisé ce mot pour aucun des quatre présidents pour lesquels j’ai travaillé: il ment », avait-il affirmé.
Colin Powell, aux origines modestes, a grandi à New York, où il est né le 5 avril 1937 à Harlem et où il a étudié la géologie.
Il avait commencé sa carrière militaire en 1958. D’abord posté en Allemagne, il avait été envoyé au Vietnam à deux reprises.
Il avait été chargé d’enquêter sur le massacre de My Lai, considéré comme l’un des épisodes les plus noirs de l’histoire de l’armée américaine. Le ton de son rapport avait été critiqué, certains considérant qu’il rejetait toute faute imputable aux militaires.
Rendu populaire par sa gestion de la première guerre du Golfe contre l’Irak en 1991, il avait été vu comme un candidat crédible pour devenir le premier président américain noir mais ne s’était finalement pas présenté.
Colin Powell avait donné son nom à une doctrine, officieuse, selon laquelle si les Etats-Unis doivent intervenir dans un conflit étranger, ils doivent déployer une force puissante avec des objectifs politiques clairs.
Source: TV5Monde