COHABITANT AVEC LE PALAIS PRESIDENTIEL

Il y a environ 138 ans que poussait au flanc de la colline abritant le palais présidentiel un quartier dénommé Koulouba. Djan Diakité, venait de trouver un habitat à quelques encablures du domicile du gouverneur Faidherbe dont il était un guide.

Le quartier prit progressivement corps avant de connaître, quelques décennies plus tard, son premier chef traditionnel, Djigui Diakité, neveu du fondateur Djan Diakité. Avec l’indépendance, les chefs d’Etat successifs auraient reconnu ce site comme quartier et ne se faisaient pas prier pour solliciter ses chefs dans la prise de certaines décisions ou lors de certaines cérémonies d’accueils d’illustres personnalités au Mali.

Les rapports étaient au beau fixe jusqu’à l’heure du président Alpha Oumar Konaré qui fait honneur à ce quartier en le faisant traverser par une route discrète reliant le centre-ville au palais présidentiel. Cette route venait s’ajouter à l’adduction d’eau potable et de l’électricité comme services sociaux de base.

Mais le lotissement qui paraissait comme une impérieuse nécessité se fait toujours attendre.  Ce quartier de la Commune III de Bamako reste jusque-là l’exemple de cohabitation disharmonieuse du palais présidentiel et ses quartiers riverains.

Pourtant rien ne peut expliquer ce paradoxe de Koulouba, car, de 1979 à 1983, Koulouba figure dans le schéma directeur de la ville de Bamako comme un quartier à part entière avec un territoire allant bien au-delà des zones habitées. A ce titre, le lotissement devait s’effectuer sans anicroche, car il existe de l’espace pour recaser les victimes du lotissement de l’ancien tissu.

Mais à la surprise générale, sur l’actuelle cartographie de Bamako, ce quartier est oublié et réduit au seul siège du palais présidentiel.

Les raisons inavouées d’un abandon

Qu’est-ce qui a donc motivé l’inexistence du quartier de Koulouba sur la cartographie de Bamako ? La question taraude bien la population du quartier. Le patriarche Kariba Bakayoko, 92 ans, ne veut pas épiloguer, mais reste déterminé pour la restauration de son quartier. Cela ne sera que justice.

Selon le président de l’Association des jeunes pour le développement du quartier de Koulouba dénommée Jèkabara, Ibrahim Diakité dit Backo, la restauration et la délimitation de Koulouba ne seront que justice. Pour lui, en délimitant Koulouba, l’administration mettra les réserves foncières de ce quartier à l’abri des spéculateurs fonciers, donc à l’abri des conflits sociaux.

La restauration permettra de renouer les relations de considération entre Koulouba et les autorités publiques. Lui comme le chef du village Kariba Bakayoko attend toujours la traditionnelle visite de courtoisie de la part de l’actuel occupant du palais présidentiel. A défaut de recevoir ou d’être le chef de l’Etat par intérim, ils ont pu rencontrer le secrétaire général de la présidence, Ousmane Sy, à qui ils ont fait part de leurs difficultés. Celles-ci sont d’ordres sécuritaire, sanitaire et social.

De nos jours, faute d’accès (routes) les malades et les cadavres humains sont transportés par des brancards, car il est impossible de circuler même une moto ambulance dans le quartier faute d’accès.

Pour un autre leader de l’Association des jeunes du quartier, Dianguina Kéita, la limitation et la restauration de Koulouba doivent revenir de droit à son quartier qui a déjà accompli ses devoirs : paiement des taxes et impôts au marché ; participation à tous appels de l’Etat…

Il ajoute que la jeunesse tient tellement à ce projet qu’elle lance l’ultimatum aux décideurs à tout mettre en œuvre pour corriger cette injustice pour que le palais présidentiel reste à son actuel emplacement. « Koulouba délimité et restauré ou le palais présidentiel déplacé, les autorités ont un choix à faire », martèle-t-il.

Par la voix de Fatoumata Traoré, les femmes de Koulouba lancent leur cri de cœur. « Nous cherchons le lotissement de notre quartier pour espérer l’assainir. Or, sans assainissement, c’est toujours les maladies », renchérissent-elles.

De nos jours, le problème d’écoulements des eaux usées et des eaux de ruissellement est un véritable casse-tête pour les habitants qui déplorent la vie en promiscuité due au non lotissement du quartier. Depuis les événements de mars 1991 Koulouba subit les effets collatéraux des insurrections armées et des coups d’Etat. En mars et mai 2012, les habitants de ce quartier ont souffert le martyre lors des affrontements entre putschistes et forces loyalistes.

Situé entre le quartier de Sokonanking, le quartier de Point G, Kati et Ntomikorobougou, le quartier de Koulouba est asphyxié de toutes parts : manque d’espacement vert, d’espace d’épanouissement pour les jeunes et de réserves foncières devant abriter ses 26 000 âmes.

Le candidat à la présidentielle qui aura proposé une solution pour ce quartier et ses problèmes aura les suffrages de ses habitants.

Markatié Daou l’indicateur 2013-04-22 00:15:28