On peut y lire, en effet, «après plusieurs mois de travail avec le Haut Conseil Islamique, une formulation adéquate des amendements à soumettre à la seconde lecture était élaborée. La commission procéda à l’écoute de certaines personnes ressources, des associations féminines, des autres associations de la société civile, l’église catholique et l’église évangélique protestante, le SYLIMA, et enfin le Comité de plaidoyer. Par la suite, toutes ces associations furent conviées à l’atelier des 15 et 16 Novembre 2011, tenu à la salle Awa Keita de l’Assemblée Nationale. Qu’il s’agisse du WILDAF, du REFAMP ou du groupe PIVOT Droits et Citoyenneté des Femmes (GP-DCF), de la CAFO, et de l’AJM, les associations ont exprimé beaucoup de réserves sur les amendements proposés. Elles ont même eu à faire de nouvelles propositions de rédaction dont certaines furent bien accueillies notamment en matière de mariage religieux. Pour l’essentiel, les différentes parties entendues ont adhéré à la légalisation du mariage religieux, tout en demandant que soient prises les mesures d’accompagnement nécessaires de nature à fiabiliser le processus».
Plus loin, l’on note que les associations de défense des droits humains et autres organisations de la Société civile ci-dessus citées ont bien rappelé à nos législateurs les dispositions des textes internationaux relatifs aux droits de la femme et de l’enfant, auxquels le Mali a librement adhéré, comme en témoignent ces passages du Rapport de la Commission Loi: «Les personnes ressources comme les associations ont en revanche émis quelques réserves sur l’omission de l’affirmation des droits de la femme et de l’enfant tels qu’exprimés par les traités et accords internationaux. Elles ont aussi marqué leur opposition à l’idée de soustraire de la liste des mariages prohibés: le mariage entre la femme et le frère de son mari vivant, le mariage entre l’homme et l’ancienne épouse de ses oncles paternels et maternels et le mariage entre l’adoptant et l’adopté. La question de l’adoption filiation a fortement divisé les parties. Si le Haut Conseil Islamique y est resté absolument opposé, les autres confessions religieuses et les associations ont insisté sur la nécessité de garder l’adoption filiation dans le code, pour assurer la prise en charge et la protection des enfants abandonnés et des enfants dont les parents sont inconnus».
Toutes choses qui ont amené les rédacteurs du Rapport à (fortement) recommander «L’adoption d’un statut des ministres du culte habilités à célébrer le mariage religieux, dans la concertation entre les pouvoirs publics, le haut conseil islamique, l’église catholique et l’église évangélique protestante; La mise en place par les pouvoirs publics, en concertation avec les différents ordres religieux, d’une structure d’accueil, d’aide et d’assistance à l’éducation des enfants abandonnés et des enfants sans parents connus, qui contribuerait à la moralisation des processus d’adoption; Une large sensibilisation des populations et des organisations de la société civile pour une meilleure compréhension et un meilleur accueil du texte».
Pourtant, au final, il est clair que le texte adopté par l’AN n’a que de très lointains liens avec les contenus des Déclarations, Chartes, Protocoles additionnels et autres Conventions en faveur des droits de l’homme, des femmes et des enfants signés et ratifiés par le Mali. Par ce vote, nos Honorables, notre Gouvernement et le Chef de l’Etat, qui a renvoyé le Code des Personnes et de la Famille en seconde lecture, après avoir refusé de promulguer le document adopté en première instance par le Parlement, mettent notre pays en porte-à-faux vis-à-vis de ses engagements internationaux.
Si cela ne semble pas en déranger certains plus que de raison, convaincus qu’ils sont de leur bon droit de réfuter les arguments «droits de l’hommistes inspirés par l’Occident», comme ils se plaisent à le dire, il y a pourtant fort à parier que, lors de notre second passage à l’Examen Périodique Universel du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, en 2013, le ministre en charge du département de la Justice ne sera pas dans la situation la plus confortable! Qu’on le veuille ou non, le Mali fait bel et bien partie de ce qu’il est convenu d’appeler la communauté internationale et ne saurait rester à l’écart de son évolution, évidente dans les modes de vie en changement constant de ses citoyens, même si elle ne l’est pas encore dans les textes qui nous régissent en ce début de 21ème siècle. Nous y reviendrons.
Ramata Diaouré
22 Septembre 22/12/2011