Désormais, il va falloir compter avec des noms comme Youssouf Cissé, Oumar Niguizié Sinenta, Moctar Barry et Soussaba Cissé dans le paysage du cinéma malien. Ces jeunes qui ont choisi de faire du cinéma leur métier étaient à l’honneur le 26 novembre 2010, au cinéma Babemba de Bamako. C’est ce jour-là, dans le cadre du festival de Nyamina et des rencontres cinématographiques de Bamako que Souleymane Cissé a décidé de donner l’opportunité à quatre jeunes maliens de montrer ce qu’ils savent faire dans le domaine du cinéma. Même si deux des jeunes réalisateurs sont les enfants de l’icône du cinéma malien, cela n’enlève rien à la valeur de sa démarche.
« Nous sommes pratiquement vieux et le moment est venu de songer à faire la promotion des jeunes afin qu’ils gardent allumé le flambeau du cinéma malien », telle est la conviction du réalisateur malien, seul détenteur de deux étalons de Yennenga. L’initiative de l’UCECAO a donné l’occasion aux amoureux du cinéma au Mali d’apprécier des talents naissants. Oumar Niguizié Sinenta, jeune réalisateur malien, eut le privilège d’ouvrir le bal. Son court-métrage sur la vengeance n’a pas manqué d’arracher des applaudissements nourris dans la petite salle du cinéma Babemba qui a refusé du monde. Il a été suivi par Soussaba Cissé qui a présenté son film « Sebe Tan » sur l’immigration. Dans un style sans détours, Soussaba Cissé a plongé son objectif dans le jeu de cache-cache que jouent nombre de sans papiers avec les policiers en France, jusqu’au jour où ils sont arrêtés. Dans le très court-métrage, un sans papier, apparemment malien, sera arrêté par la police au moment où il était en compagnie de sa fillette dans un square pour une bonne période de détente.
Les policiers tenant le père par les deux bras, avec la ferme volonté de le conduire au commissariat, la petite opposée à toute idée de voir son père partir, dans une action ultime de résistance, va s’agripper à sa jambe avec la ferme volonté d’empêcher les policiers d’avoir le dessus sur son père. C’est sur cette image pathétique, pleine d’émotion et de suggestions, que le film prend fin. Impressionné par le tour de main de la réalisatrice, le public va lui témoigner sa reconnaissance par des applaudissements nourris. Pour sa part, dans un film intitulé « Tigana », Moctar Barry va inviter les cinéphiles à suivre un jeune africain dans son rêve à devenir un grand footballeur. En plus des difficultés financières qui peuvent être de nature à les empêcher de s’épanouir, ces jeunes amoureux du football, à en rêver en footballeur célèbre, doivent subir tous les abus des entraîneurs, même à devenir victime des pratiques malsaines de corruption.
Mais, le deuxième film de Soussaba Cissé intitulé « Bah Mousso », en relation avec le fléau de l’excision, allait finir de convaincre les cinéphiles du choix qu’elle a fait de mettre l’homme au centre de son travail cinématographique. Dans ce film, à travers une histoire compréhensible par tous, la réalisatrice, sans rentrer dans le grand débat autour de l’excision, expose une de ses facettes négatives sur la santé des filles et celle des femmes. Ce film a bénéficié du talent de Habib Dembélé dit Guimba. Et, ce fut le tour de Youssouf Cissé de plonger l’objectif de sa caméra dans le travail de Malick Sidibé, célèbre photographe malien. Intitulé « Studio Malick », comme le nom que porte le local qui a vu Malick faire des miracles, ce film est un documentaire de belle facture qui revient largement sur le travail photographique qui a hissé notre compatriote au sommet de la discipline dans le monde. Salif Keita, le Domingo du football malien, invité d’honneur de la soirée, a salué le talent des jeunes réalisateurs. Il les a invités à persévérer afin de devenir demain tous des Souleymane Cissé pour le Mali.
Assane Koné
Le Républicain 30/11/2010