Ce sursaut sera inspiré par ce que nous appellerons ici deux indicateurs : une mobilisation historique de l’électorat d’abord et le choix d’un président ou d’une présidente qui répond aux impératifs actuels du Mali face à lui-même, du Mali en Afrique et du Mali dans le monde. Des indicateurs pour l’instant mais qui peuvent être des objectifs stratégiques.
Car une base politique et sociale forte est un bon signal et un début de feuille de route pour n’importe quel élu. Or le Mali a toujours élu son président avec moins de 40% de l’électorat. Cela veut dire, à l’analyse des voix obtenues dans les différents scrutins de 1992 à 2007, qu’on peut gouverner le pays rien qu’en réunissant autour de son nom le tiers des voix du District, de la Région de Koulikoro et d’une partie du Sud de la Région de Ségou. Dans certains pays, un si faible seuil de voix annule automatiquement le scrutin. Heureusement ou malheureusement, cette clause n’existe pas chez nous. Sinon toutes nos présidentielles jusque-là auraient été annulées et reprises. Ou alors, nous nous serions surpassés pour corriger le faible taux de participation. D’abord, en nous assurant que le fichier électoral reflète vraiment l’électorat, puisqu’après tout le taux de participation, c’est le nombre de votants par rapport au nombre d’inscrits.
Or, nous le savons tous ici: le fichier électoral du Mali a la curiosité unique de renverser la pyramide des âges, pas seulement celle du Sahel mais de l’Afrique entière dont la population présente même les caractéristiques, les démographes et les planificateurs le savent.
Ensuite, l’Etat aurait mis le paquet pour que la mobilisation des électeurs soit massive, ce à travers un programme soutenu de construction et mesurable de construction de la citoyenneté, plutôt que de se rabattre sur les capacités de mobilisation des partis après l’ouverture de la campagne. D’autant que les élections coûtent à notre maigre budget national un peu moins du quart des ressources allouées au secteur éducatif, soit plus d’une dizaine de milliards de nos francs. En ce moment donc, le combat de certains partis pour un fichier électoral fidèle est tout sauf pure chicane.
Elle participe à la crédibilisation de notre gouvernance. La manière dont ce combat est mené ou perçu, étant une autre paire de manche. Puis quand le problème du taux de participation est réglé, quel président faudra t-il au Mali des enjeux du moment et des défis futurs. Ces enjeux et ces défis, naturellement, doivent être définis et sans doute les programmes des candidats les mentionneront. Mais il est indiscutable que le pays, depuis vingt ans, a mis sur le cap sur la démocratie libérale. Or où en sommes-nous avec ce projet ? L’approchons-nous vraiment ? Ou recourons-nous simplement à ses grandeurs en nous éloignant de ses servitudes ? Que faisons-nous au jour le jour pour avoir une société ouverte qui fonctionne à l’ascenseur républicain – le mérite et l’équité- et non au carburant toxique de la gouvernance de coterie qui, elle, procède par la dissimulation de ce qui ne peut l’être et la perversion de ce qui ne se doit pas. La jeunesse malienne seule a le dernier mot en 2012.
A condition qu’elle se lève dès maintenant ! Qu’elle se fasse enrôler massivement. Qu’elle refuse la stratégie de la fraude. Et qu’elle utilise l’arme fatale du vote contre tous ceux qui sont candidats pour les privilèges et pas pour le projet de présence d’un pays qui , au nom de l’histoire et de ses combats, ne doit pas être absent là où se trouve le Cap-vert ou le Ghana. Parce que ce pays a le potentiel des victoires voulues.
Mais une certaine jeunesse ne sera pas au rendez-vous. C’est celle malsaine de la génération jakartas qui en illustrant la faillite de l’encadrement familial et de l’action publique montre l’exemple de ce que le Mali ne doit pas être demain. Il s’agit ici de la génération consciente. Elle ne court pas les rues mais elle existe. Fasse le ciel qu’elle s’exprime !
Adam Thiam
Le Républicain 22/07/2011