Et pourtant, le 6 avril nous avions démontré que le 22 mars était une erreur tragique, un regrettable coup de sang. Un mois plus tard à Koulouba, revenant sur le lieu du crime, nous avons transformé l’erreur en faute, à travers plusieurs violences : celles contre un homme de soixante dix ans, celle contre la première institution du pays, celle contre l’hôte qui a ouvert sa porte aux adversaires, celle contre la réputation du Mali. Il est donc normal que nous ne soyions plus le peuple-vitrine d’antan dont la démocratie était montée en épingle, sans doute surestimée, méconnue et perfectible mais qui bénéficiait de la perception de sincérité.
Et qui, malgré les soubresauts du Nord, une crise politique grave en 1997 et des élections incompréhensiblement carencées à chaque fois, restait supérieure à celle de bien des pays africains qui aujourd’hui nous regardent tantôt stupéfaits parfois méprisants et peut être méprisés. Comment peut-il en être autrement ? Nous étions jusque-là le pays où se négociait rubis sur ongle la libération des otages. Nous sommes devenus aujourd’hui le pays où les terroristes se promènent impunément.
Nous sommes devenus le pays désossé par sa rébellion qui le nargue superbement tous les jours. Nous sommes devenus le pays qui a tabassé son président. Le pays qui apprend par les antennes et deux fois depuis le début de la crise par pas moins que le président de l’Union africaine lui-même qu’il est la cible d’une attaque militaire internationale. Il nous reste désormais peu de fierté mais beaucoup d’orgueil. Mais il ne tient qu’à nous de repartir du bon pied. Car nous en avons les ressources. Les ressources d’une nation qui a montré qu’elle sait être grande. Et que nous avons ramenée plus petite que terre.
Adam Thiam
Le Républicain Mali 01/06/2012