Chronique du vendredi / Des inconnues mais une certitude : le Mali continuera



On sait que l’application électorale attendue du Ravec ne sera pas du rendez-vous. C’est dommage. Mais au moins, le travail de réactualisation de l’ancien fichier électoral est en cours. Il pose deux problèmes, nous le savons : celui de baisser le taux de participation pour être sur-gonflé. Et celui d’être, par l’accumulation de cartes d’électeurs issues de doublons, voire plus, la voie royale de la fraude non pas comme incident de parcours mais stratégie de désignation du premier magistrat de la République.     

Là-dessus cependant, tout est clair : la responsabilité de la fraude « stratégique » n’incombe pas à la carte. Si l’Etat, les institutions qui gouvernent l’élection ainsi que les candidats – y compris celui à qui le tripatouillage peut profiter- jouent effectivement leur partition,   la sincérité des résultats sera préservée. Avec elle l’honneur d’une démocratie dont la qualité des scrutins reste hautement perfectible. Mieux, sera garantie  une paix sociale désormais à l’épreuve, non de n’importe quelle présidentielle mais d’un scrutin d’alternance  rendu plus sensible par le  renouvellement de générations de politiques qu’il porte en filigrane. L’argent ne doit pas normalement être une zone grise puisque nous savions depuis cinq ans qu’il faudrait aller aux élections en 2012.

Il y a simplement que le budget pour 2012 est particulièrement salé en partie à  cause du scrutin référendaire. Or depuis quelques années, la communauté internationale ne finance les élections que dans les pays en crise. Il reste deux zones grises, et ce sont les vraies : le Nord et la portée du vote des Maliens. Rien ne nous dit que la baraka qui poursuit ce vieux pays se tassera et empêcherait l’élection dans notre septentrion. Lequel, malgré ses multiples soubresauts du passé a envoyé  des signaux moins inquiétants que ceux qu’il envoie actuellement où le nouveau défi du retour des militaires de Kadhafi s’ajoute aux défis un peu plus anciens des activités salafistes et mafieuses. Et le tout, dans une zone crisogène. En 1992, la République a voté sans la région de Kidal.

En 2012,  cependant, elle ne peut s’offrir le luxe de se passer du vote de Kidal, Gao et Tombouctou, des régions confrontées, à des degrés inégaux il est vrai, à la crapulerie de grand chemin mais à des velléités sécessionnistes si celles-ci devaient avoir plus d’amplitude qu’en ce moment. Quant à la portée du vote des Maliens à la présidentielle et aux législatives de 2012, que se passera t-il ? La jeunesse, force majeure et force montante, a le potentiel pour un vote de rupture à partir de critères bien informés, dont la légitimité des candidats, leur intégrité et leurs propositions. Zone grise pourtant : le temps est juste, le travail pour  mobiliser est lacunaire et sauf miracle, les moyens vont parler et peut-être suffire.

Ce ne serait pourtant pas pour le bonheur du pays. Nous avons pourtant l’opportunité d’élire un Pedro Pires, notre salut ne pouvant être que dans un projet d’émergence dans un monde qui rejette de plus en plus l’insuffisance et la médiocrité. Quasi certitude cependant : nous n’aurons pas de Helene Sirleaf Johnson malienne. A défaut, il reste à voir si les électeurs vont peser et soupeser la variable première dame. Tous les jeux paraissent ouverts. Mais le temps est quelque peu couvert. Au milieu de tant d’inconnues, une seule certitude : le Mali doit continuer. Ibk ne nous en voudra pas de lui emprunter sa formule-massue.

Adam Thiam

Le Républicain 04/11/2011