Carnage à Kidal Les autorités veulent-elles échapper à la CPI ?

Le Mali va aux négociations avec les groupes armés dans une position défavorable, comme à la case départ, parce que les rapports de force sur le terrain sont défavorables à notre pays. Mais, si on fait référence aux raisons de la récente dégradation de la situation à Kidal, on peut dire que notre pays était dans son droit, car rien de normal que la visite d’un Premier ministre dans une partie de son territoire, car cela faisait 36 mois qu’aucune autorité malienne n’avait foulé le sol de Kidal, à plus forte raison 7 ministres.

Sur les causes profondes du conflit malien, on se demande aussi quelles sont les revendications des groupes armés, car ils ne revendiquent plus l’autonomie, l’indépendance et la laïcité. On se demande qu’est-ce qu’ils vont demander à l’Etat malien. En même temps, on se demande pourquoi le Mali aussi a peur d’aller à la table des négociations et pourquoi tant d’hésitations de la part du président malien. Ce dernier doit tout faire pour unir les Maliens autour de lui, car ce n’est pas le moment des querelles politiciennes. Tous les Maliens doivent plutôt s’unir autour du Mali. Et c’est le chef de l’Etat qui doit le faire, en appelant tous les fils du pays pour trouver une solution à la crise, parce que même les opposants qui crient, s’ils viennent au pouvoir sans union autour des questions essentielles, ce sera la même chose.

Une chose est sûre : il n’y aura aucune suprématie d’une ethnie sur une autre. L’Etat uni avec tous les fils du pays pourra faire face à tout. Il s’agit de créer une entité de gestion du pouvoir local où les populations à la base feront leur choix, chacun à son niveau ; de créer une nouvelle méthode de gestion basée sur les réalités de chaque région, cercle et village. Cette entité peut être administrative avec une gestion plus locale.

IBK doit prendre ses responsabilités en homme politique averti pour rencontrer lui-même la classe politique, les femmes, la jeunesse et les leaders religieux de notre pays. Les marches des femmes, jeunes  ministres, députés, fonctionnaires peuvent être des moyens de pression, mais ne peuvent pas résoudre cette situation qui découle d’une crise profonde : il faut l’union sacrée des Maliens autour du Mali.

Une fuite en avant

Aujourd’hui personne ne connaît le bilan chiffré des affrontements du mercredi 21 mai 2014 à Kidal. Même ceux qui revendiquent la victoire n’ont pas donné de chiffres précis des personnes qui ont perdu la vie. Les alliés du Mali, surtout la Minusma, se privent aussi d’avancer des chiffres. De même, les populations de Kidal disent qu’elles ne connaissent pas le nombre, parce qu’il y a eu beaucoup de morts de part et d’autre, dans la ville et autour de la ville.

La France, sachant bien que ça a été un véritable carnage entre soldats et terroristes, se contente de dire : «C’est un problème de sécurité interne». Mais, dans cet affrontement meurtrier, les autorités françaises avaient fait savoir que Serval n’intervient pas dans un conflit entre Maliens. Les groupes armés, eux, pour une fois, ont été prudents. C’est pourquoi les autorités maliennes aussi n’ont pas fait de bilan.

Le Mali ne peut pas faire de bilan, parce qu’il n’a plus de camp militaire à Kidal. Mieux, ce carnage n’est pas facile à comptabiliser. Personne n’est prêt à endosser la responsabilité de ce qui s’est passé à Kidal. Même Moussa Mara, le Premier ministre malien, qui a dit ceci : «Aucune autorité politique n’a donné l’ordre d’attaquer». Quant au ministre de la Communication, il a dit que les responsabilités seront situées.

Moussa Mara aurait-il oublié ses propos tenus à Gao, quand il parlait d’apporter une réponse appropriée à cette déclaration de guerre ? C’est facile à comprendre, toute cette campagne médiatique du gouvernement malien vise un seul objectif : éviter la CPI pour ne pas être accusé d’avoir envoyé des soldats maliens à la boucherie. C’est pourquoi le ministre de la Défense parle de 250 hommes au lieu de 1500 soldats précédemment annoncé, comme renfort à Kidal.

Aujourd’hui personne ne veut donc être le responsable de ce carnage qui est arrivé aux soldats maliens face aux jihadistes. 200 hommes face au triple et de surcroît, des jihadistes et terroristes qui ne respectent aucune règle de la guerre conventionnelle. Le gouvernement se justifie en disant qu’il n’a pas donné d’ordre d’attaquer ; donc, ce sont des militaires maliens qui ont attaqué d’eux-mêmes. On ne peut pas comprendre qu’après tant de déclarations, des ministres soient envoyés en mission en France pour aller parler dans les médias occidentaux, pendant que d’autres ministres marchent dans les rues de Bamako, tout comme des députés, juste pour créer la confusion en affirmant qu’ils soutiennent l’armée malienne. Cette armée qui a attaqué, sans l’ordre de nos plus hautes autorités. «Réaffirmons notre engagement et notre soutien constants et indéfectibles au président de la République Ibrahim Boubacar Kéïta, Chef suprême des Armées», martèlent-ils.

IBK doit voir la réalité en face et appeler tous les Maliens autour de lui pour soutenir le Mali. La fuite en avant ne servira à rien. Même la CPI que les autorités craignent, ne peut rien faire tant que les Maliens sont unis autour du Mali. De l’autre côté, IBK doit sanctionner et prendre ses responsabilités, parce qu’une telle situation ne doit se faire sans qu’il n’y ait des sanctions. En tout cas, s’il laisse passer cette affaire sans sanction, cela risquerait de se reproduire.
Kassim TRAORE

Le Reporter 2014-05-28 01:01:23