En Mars 2009, Abderrahmane Ag Gala eut un entretien avec des agents de l’ambassade américaine pour discuter de la crise malienne. En tant que touareg Ifoghas, Abderrahmane ag Gala appartient au meilleur terroir de la hiérarchie Kairu Touareg. Les leaders traditionnels des Touaregs de Kidal, la famille Intallah, sont des Ifoghas de la fraction Kel Affella. Au cours de la rébellion 1991-1996 du nord du Mali, Gala était chef de l’Armée Révolutionnaire pour la Libération de l’Azawad (ARLA). Il fut parmi un groupe restreint d’ex-rebelles réhabilités et nommés dans les missions diplomatiques maliennes à l’étranger.
Les liens familiaux d’Ag Gala, ses antécédents dans le milieu rebelle et son affectation au consulat malien à Tamanrasset, en Algérie, lui offrent un point de vue unique et remarquable dans le suivi des événements et des tendances des deux côtés de la frontière algéro-malienne. Ag Gala expliqua que son rôle à Tamanrasset impliquait principalement la fourniture de services consulaires aux expatriés maliens. Il estima qu’environ 20% de la population touareg à Kidal détenait une double nationalité malienne et algérienne.
Malgré les promesses de décentralisation, la demande d’un passeport doit se faire à Bamako. Ce qui rend presque impossible aux maliens dans les zones lointaines comme Kidal et Tessalit d’obtenir des passeports. Ag Gala déclara que le consulat malien à Tamanrasset était submergé par les demandes de titres de voyage par les maliens qui n’ont pas de passeports. Un constat important est que des non-maliens, principalement d’origine nigériane et ghanéenne, obtiennent par des moyens frauduleux des passeports maliens à Bamako pour se rendre en Algérie. Selon Ag Gala, le Mali est le seul pays de l’Afrique subsaharienne dont les citoyens ne sont pas tenus d’obtenir un visa d’entrée en Algérie, ce qui rend les passeports maliens extrêmement précieux pour les migrants partant pour l’Europe.
D’après Ag Gala, le gouvernement malien aurait du mal à dissoudre la milice arabe malienne qu’il a formé pour évincer le chef rebelle touareg Ibrahim Bahanga du nord du Mali. Contrairement à la milice Imghad touareg du Mali, créée par le colonel militaire malien El Hadj Ag Gamou en 2008, pour contrebalancer divers groupes rebelles Touaregs, les milices arabes étaient financées et équipées par des hommes d’affaires privés arabes. Leur but était de libérer les routes de trafic menacées par Bahanga.
Selon Ag Gala, la milice touarègue dirigée par le colonel Ag Gamou a été largement intégrée dans l’armée malienne, recevant du gouvernement des véhicules, des armes à feu et d’autres équipements. Par contre, les milices arabes, recevaient leurs véhicules et leurs carburants des trafiquants arabes avec un intérêt commercial. Ces milices arabes voulaient débarrasser le nord de Bahanga pour réduire les risques encourus par leurs convois de contrebande. Ces convois traversaient un territoire hanté par Bahanga et sa bande.
Frustré par l’incapacité d’Iyad Ag Ghali d’arrêter le harcèlement des convois de contrebande opérés par des trafiquants arabes en 2008, les dirigeants arabes offrirent leurs services au gouvernement malien dans son combat contre Bahanga. La décision du Mali d’aller de l’avant avec ces milices a essentiellement fourni aux trafiquants arabes une protection et un soutien du gouvernement. Après avoir réussi leur mission, ces milices avaient toujours un intérêt particulier à conserver leur avantage et la protection militaire les permettant ainsi de continuer leurs activités illicites.
Dans leur lutte contre Bahanga, les milices étaient d’abord dirigées par un officier militaire arabe, le colonel Abderahmane Ould Meydou. Puis à un moment donné, le Colonel Lamana Ould Bou prit les commandes. Il était profondément impliqué dans le commerce de contrebande au nord du Mali et était également un proche collaborateur du Colonel Mamy Coulibaly, ancien directeur de la Sécurité d’Etat.
Amadou O. Wane
Collaborateur externe,
Floride, Etats-Unis