Le secteur des télécoms au Mali a fait l’objet d’une restructuration en 1999 lorsque le gouvernement assoupli ses lois sur l’investissement et commença à privatiser la Sotelma, la société parastatale. En 2002, la société française Ikatel, renommée par la suite Orange Mali, avait considérablement augmenté la couverture téléphonique de quelques centaines de lignes en 2002 à plus de deux millions en 2008. En 2004, le gouvernement adopta une feuille de route pour la privatisation de la Sotelma, qui attribuerait 51% du stock à un partenaire stratégique, 19% à un investisseur privé national, 10% aux travailleurs de la Sotelma et 20% au gouvernement malien. La Sotelma possédait 90.000 lignes terrestres et 4080 lignes Internet, tandis que sa filiale de téléphonie mobile, Malitel, comptait 672.000 lignes. Au total, le chiffre d’affaires de l’entreprise était de 95,4 milliards de F CFA par an.
La banque londonienne Linkstone Capital fut désignée en 2007 par le gouvernement en tant que conseiller financier pour la privatisation. En juillet 2008, le gouvernement organisa une conférence des investisseurs à Paris, après laquelle 18 entreprises, dont Maroc Telecom, ont été pré-qualifiées pour soumettre une offre. Après la révision des offres techniques et financières, le gouvernement annonça le 28 février que Maroc Telecom avait soumis l’offre gagnante de 165 milliards de F CFA. Le deuxième et troisième offre ont été faites par la compagnie soudanaise Sudatel et Portugal Telecom.
Malgré l’annonce d’un gagnant, l’accord semble avoir échoué en mai lorsque le gouvernement augmenta le prix demandé. Selon la loi, le gouvernement et Maroc Telecom disposaient de 60 jours pour finaliser la vente. Le gouvernement malien demanda à Maroc Telecom d’augmenter son offre de 165 milliards à 270 milliards de F CFA pour apaiser les travailleurs syndiqués de la Sotelma. L’argent supplémentaire devrait être utilisé pour verser des indemnités de licenciement à plus de 600 employés, soit environ 50% de l’effectif de 1 380 personnes. La période de 60 jours s’est terminée sans accord.
Le syndicat des travailleurs des télécommunications continuait de faire pression sur le gouvernement et sur ses membres pour qu’ils concluent un accord. Lors d’une réunion de l’Union nationale des télécommunications (Syntel), le secrétaire général Youssouf Sangaré averti l’assemblée des conséquences d’un non-accord. Les retards dans la privatisation entraîneraient le report du programme de retraite anticipée ; ce qui alourdirait les finances de l’entreprise et affecterait les salaires. Les retards augmenteraient également les responsabilités de la Sotelma.
Le 12 juin 2009, Moctar Traoré, Directeur par intérim du Comité de réglementation des télécommunications (CRT), déclara que le gouvernement malien tenait toujours à un accord avec Maroc Telecom. Le gouvernement était impatient de conclure la privatisation afin que Sotelma, avec ce nouvel investissement en capital, puisse commencer à mettre à niveau ses infrastructures afin d’améliorer et d’étendre ses services. Un accord avec Maroc Telecom permettrait également de régler les négociations onéreuses avec la Syntel sur l’indemnisation des travailleurs. Mais, le succès de l’accord comportait des enjeux plus importants pour l’économie malienne, qui bénéficierait des revenus importants de la vente. Selon les prévisions du chef de la division adjointe du Département Afrique du FMI, Xavier Maret, le capital reçu de la privatisation de la Sotelma améliorerait la balance des paiements du Mali en 2009.
L’offre de Maroc Telecom était supérieure à celle de ses deux rivaux réunis, suggérant que cela était la meilleure chance du gouvernement de privatiser l’entreprise parapublique, dont les responsabilités augmentaient avec le temps. Avec la pression de la Syntel et la forte concurrence d’Orange Mali, le gouvernement était très motivé pour parvenir à un accord. L’enchère de Maroc Telecom était également la preuve de l’investissement vigoureux du Maroc dans la région.
Amadou O. Wane
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