Malgré la levée de bouclier d’indignation, cela ne semble point avoir ébranlé la volonté de ceux qui tiennent coûte que coûte, vaille que vaille, non plus à contrôler la presse malienne, mais plutôt à la faire taire. Hier 12 juillet 2012, aux environs de 22 h, notre confrère Saouti Labass Haïdara a été enlevé au siège de son journal par des hommes cagoulés et armés, qui l’ont transporté hors de Bamako et l’ont torturé puis l’ont abandonné pour mort.
Tout en réaffirmant notre solidarité agissante à l’endroit de notre confrère et à l’ensemble de la presse indépendante malienne, nous tenons à mettre en garde les adeptes des pratiques moyenâgeuses relevant de la préhistoire de la presse, que nous ne saurions permettre les dérives flagrantes en cours et que nous nous battrons au plan national, sous-régional et continental pour gagner et garantir le droit d’exercer notre métier.
Il nous plaît de leur rappeler que s’ils ont oublié d’où ils viennent, nous non. Et nous ne sauront laisser des prédateurs de la liberté d’expression continuer à s’en prendre allègrement à nos confrères. Aujourd’hui plus qu’hier, nous sommes tous des Saouti et nous combattrons tous ceux qui veulent nous cantonner à faire un traitement unilatéral, pernicieux et vicieux de l’information. La liberté de la presse est la condition première de la démocratie et, dans le cas du Mali, elle est l’une des conditions du recouvrement de l’intégrité territoriale et la création d’institutions fortes.
Invitons les plus hautes autorités maliennes à prendre les dispositions les plus utiles pour que notre confrère reçoive les soins les plus appropriés dans un centre médical adéquat. Exigeons l’arrêt immédiat des harcèlements et des agressions à l’endroit de nos confrères ! Interpellons le gouvernement de transition, les forces militaires, les parties politiques toutes tendances confondues, à œuvrer à mettre fin à de telles actes et à contribuer à ce que les coupables soient arrêtés et jugés.
La FIJ dénonce une agression brutale
Dans un communiqué parvenu à notre rédaction le vendredi 13 juillet, la Fédération internationale des journalistes (Fij) dénonce ce qu’elle qualifie d' »agression brutale » et de « kidnapping » du journaliste Saouti Haïdara « par des hommes armés au Mali ». Mieux, la Fij, par la voix de Gabriel Baglo, directeur du Bureau Afrique de la FIJ, condamne « vigoureusement ces agressions lâches contre notre collègue Saouti Haïdara et les média au Mali ».
Selon Gabriel Baglo, l’on note une « recrudescence des intimidations, menaces, arrestations et attaques contre les journalistes depuis le coup d’Etat ». Suffisant pour qu’il rappelle aux autorités maliennes qu’elles ont le « devoir d’assurer la sécurité des journalistes et de tous les citoyens maliens ».
La Fij se dit vivement préoccupée par « les persistantes violations de la liberté de la presse au Mali depuis le coup d’Etat militaire du 22 mars 2012, avec des arrestations sans précédent de journalistes par les forces de sécurité. Les journalistes maliens doivent être autorisés à exercer leur métier sans aucune forme d’intimidation de la part des forces de sécurité ou d’autres groupes armés », renseigne le document.
Et de souligner que, selon des sources indépendantes y compris l’Agence France presse (Afp), le directeur de publication du quotidien privé « L’Indépendant » a été arrêté jeudi 12 juillet à Bamako par des hommes armés. Ces derniers sont entrés dans les locaux du journal, ont tiré un coup de feu dans la salle de rédaction et frappé Saouti Haïdara avant de l’emmener vers une destination inconnue. Le directeur de publication de « L’Indépendant » sera libéré après plusieurs heures de détention, avant d’être admis à l’hôpital pour des soins (après sa libération).
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La FIJ représente plus de 600 000 journalistes dans 134 pays
Reporters sans frontières regrette une lente descente aux enfers depuis le coup d’Etat du 22 mars 2012
« Alors que la pratique de l’enlèvement et de l’agression devient monnaie courante pour les journalistes de Bamako, nous demandons aux autorités compétentes d’identifier les responsables et de les condamner. Il est intolérable que dans un pays en pleine tourmente, les professionnels de l’information soient régulièrement la cible de groupes armés, qui agissent en toute impunité », a déclaré Reporters sans frontières.
« Cette pratique n’a d’autre but que de répandre la peur parmi la profession afin de réduire toute information indépendante au silence », a dénoncé l’organisation de défense de la liberté d’information. Pays exemplaire pour le continent sub-saharien en matière de liberté de l’information, le Mali connait une lente descente aux enfers depuis le coup d’Etat du 22 mars 2012.
L’Indicateur du Renouveau