Boukary Konate : « M. e-nouvelles » de Ségou

Le projet est ambitieux mais Boukary Konate, blogueur malien de 30 ans, a de la ressource. Il a mis sur la toile mercredi le blog Segou.info/Segukunnafoni pour informer les habitants de la région de Ségou, dans le centre du Mali, sur ce qui se passe à Bamako, la capitale, et dans le reste du monde. Le siège du site se trouve à Bamako où le jeune homme travaille en tant que webmaster pour le ministère de l’Education après avoir enseigné durant 7 ans le français et l’anglais. « Il y a beaucoup de choses qui se passent à Bamako, dont le monde rural n’a pas connaissance. Les villageois ne sont pas, par exemple, au courant de la tenue d’évènements comme la journée internationale de la femme ou la journée de l’Internet », explique-t-il. Ce constat est selon lui valable pour « les habitants de la capitale qui ne sont également pas informés de ce qui se passe dans les villages ».

Une bourse pour financer le projet

La création de ce blog est aussi une façon pour Boukary Konaté « de préserver les liens entre les deux régions ». Pour l’animer, il a formé trois blogueurs qui seront chargés de le mettre à jour et de rédiger des articles. Il compte notamment installer une imprimante à Ségou pour que les habitants puissent avoir accès aux informations du site sur une version papier. « Je vais également engager quelqu’un sur place pour imprimer les articles et les distribuer aux habitants qui n’ont pas accès à Internet ni aux journaux », assure-t-il.

Boukary Konaté  a pu mettre sur pied ce projet grâce à une bourse qu’il a décroché en avril après avoir participé à un concours organisé par le réseau Global Voices. « Elle m’a permis d’acheter du matériel, notamment des cartes mémoires, des téléphones portables et des ordinateurs que j’installerai dans six villages de Ségou », confie-t-il. L’objectif est d’initier leurs habitants aux nouvelles technologies à travers des ateliers de formation. « La majorité des personnes que nous encadrons n’ont jamais vu d’ordinateurs et ne savent pas comment faire pour envoyer des SMS. Nous formons surtout des jeunes mais aussi des personnes âgées », affirme-t-il. Dans les semaines à venir il prévoit de sillonner deux autres villages dans une caravane équipée d’un panneau solaire et d’une clé 3G pour former d’autres personnes.

Fasokan, un galop d’essai réussi

Mettre en place ce projet n’a pas été une mince affaire. Hormis le financement, sa principale difficulté a été de convaincre d’autres personnes de se joindre à lui. « En Afrique le bénévolat n’attire pas grand monde. Avant de s’engager dans de tels projets les gens s’assurent d’abord qu’ils seront rémunérés », souligne-t-il. Il s’est « toujours débrouillé seul », avant que 11 personnes viennent récemment lui prêter main forte.

Segouinfo n’est pas le premier blog de Boukary Konaté qui est surtout connu pour avoir créé le blog Fasokan, qui signifie en bambara, « la langue du pays ». Objectif : « faire la promotion des langues maternelles ». « Il y a des informations sur Ségou et la particularité de ce blog, c’est qu’elles sont traduites en bambara, français et parfois en anglais ». Toutes ces activités cumulées demandent beaucoup d’énergie au blogueur qui durant la semaine vit à Bamako et séjourne à Ségou le week-end. « C’est la passion qui me permet d’aller de l’avant. Quand on veut quelque chose, il faut se donner les moyens d’y arriver. Si nous n’aidons pas l’Afrique à se développer, personne ne le fera à notre place. Mon objectif est de développer les régions rurales de mon pays grâce aux nouvelles technologies ».

L’ Indicateur Renouveau 06/06/2011