Sydney – Le gouvernement conservateur australien a été privé vendredi de majorité par la Haute cour qui a jugé que le Premier ministre adjoint Barnaby Joyce ne pouvait siéger au Parlement en raison de sa double nationalité.
L’action de l’exécutif ne devrait cependant pas en pâtir dans l’immédiat, une élue indépendante ayant affirmé qu’elle ne soutiendrait pas une éventuelle motion de censure de l’opposition.
Sept parlementaires issus de plusieurs partis australiens se sont retrouvés ces derniers mois au coeur d’une controverse politico-juridique, piégés par une ancienne et obscure clause de la Constitution qui interdit aux titulaires d’une double nationalité de siéger.
Or la coalition du Premier ministre Malcolm Turnbull détenait une courte majorité d’un siège à la chambre basse du Parlement.
Bien que né en Australie, Barnaby Joyce, membre de cette chambre, s’est récemment découvert une nationalité néo-zélandaise héritée de son père, né en Nouvelle-Zélande.
Une élection partielle dans la circonscription de l’Etat de Nouvelles-Galles du Sud où était élu M. Joyce sera organisée le 2 décembre.
« La décision du tribunal aujourd’hui n’était pas celle que nous espérions mais l’action du gouvernement se poursuit », a déclaré M. Turnbull à Canberra.
La représentante indépendante Cathy McGowan a annoncé dans un communiqué qu’elle soutiendrait le gouvernement, ce qui écarte la menace de l’effondrement de l’exécutif.
Le poste de Premier ministre adjoint demeurera vacant jusque la législative partielle et la ministre des Affaires étrangères Julie Bishop suppléera M. Turnbull si celui-ci se rend à l’étranger, selon les médias locaux.
M. Joyce, 50 ans, est le chef de file du Parti national, un des deux piliers de la coalition avec le Parti libéral de M. Turnbull.
Il avait acquis une notoriété internationale en menaçant de faire euthanasier les chiens de l’acteur Johnny Depp entrés illégalement en Australie.
Cet homme qui cultive de longue date l’image d’un Australien pur et dur, portant souvent un Akubra, chapeau à larges bords typique de l’Australie rurale, a renoncé à sa nationalité néo-zélandaise. Il pourra donc se représenter.
« Je remercie la cour pour son jugement. Je respecte sa décision », a déclaré M. Joyce aux journalistes à Tamworth, une localité de sa circonscription de Nouvelle-Angleterre, ajoutant qu’il s’était « préparé à cette décision ».
« Je n’avais aucune raison de croire, comme vous le savez, que j’étais un citoyen d’un autre pays que l’Australie. Mais les choses sont ainsi. »
Outre M. Joyce, six parlementaires étaient concernés par cette controverse.
La Haute cour a validé l’élection du sénateur conservateur Matt Canavan -qui avait démissionné en juillet de son poste de ministre des Ressources après s’être découvert une nationalité italienne et peut revenir aux affaires- et du sénateur indépendant Nick Xenophon.
Outre celle de M. Joyce, elle a aussi invalidé l’élection de la sénatrice Fiona Nash, qui était membre du gouvernement, et des sénateurs Verts Larissa Waters et Scott Ludlam, ainsi que celle du sénateur Malcolm Roberts (mouvement populiste One Nation).
La coalition conservatrice est cependant déjà minoritaire au Sénat.
La saga avait commencé en juillet avec la démission de Scott Ludman, également titulaire de la nationalité néo-zélandaise.
La clause sur la double nationalité a été introduite dans la Constitution de 1901 afin d’assurer que les parlementaires n’aient « aucune adhésion à une puissance étrangère ».
Cette disposition date d’une époque où les Australiens pensaient encore qu’ils devaient en premier lieu fidélité à la couronne britannique. Dans un pays où 50% de la population est née à l’étranger ou est née de parents immigrés, elle apparaît de plus en plus archaïque.
(©AFP / 27 octobre 2017 10h41)