Bamako, lundi 20 février 2023. Une banderole accueille les visiteurs dans une grande salle de la Maison de la presse. La liste des invités censés consacrer la nouvelle plateforme « Appel du 20 février pour sauver le Mali » laisse supposer un discours plutôt critique vis-à-vis des autorités de la transition malienne et de leur projet de référendum constitutionnel, programmé le 19 mars prochain.
À mesure que la pièce se remplit, les visages esquissent de larges sourires aux sons de vuvuzelas qui évoquent d’abord l’enjaillement démocratique. Puis l’ambiance change de ton… Altercation, confusion, bousculade, débandade, jets de chaises… Il apparaît bientôt que des individus non identifiés sont là pour compromettre la réunion. Les téléphones portables retransmettent les échauffourées en direct. Les organisateurs entreprennent de repousser les trublions du jour, confisquant les vuvuzelas devenues perturbatrices et réussissant à rabattre les portes vitrées qui bloquent l’accès à la salle. Alors que l’assemblée semble enfin possible, les vuvuzelistes deviennent casseurs : plusieurs vitres sont brisées, depuis l’extérieur.
Rejet du référendum constitutionnel
La nouvelle plateforme livrera finalement sa principale revendication : l’organisation rapide d’élections, pour un retour des civils au pouvoir, sans passer par la case du référendum constitutionnel. Un mal étant parfois là « pour un bien », l’assaut des casseurs valide la diatribe de l’opposition sur l’oppression actuelle de l’espace démocratique malien. Et les opposants présents de dénoncer, à mots à peine couverts, une « intimidation » qui ne saurait se faire, selon eux, « sans l’assurance discrète des autorités ».
« Il est temps qu’on s’assume », rétorquera un internaute qui préfère approuver le happening violent du jour au nom de la lutte contre ceux qui piétineraient la transition. Et les échanges musclés de la Maison de la presse de se prolonger sur les réseaux sociaux, des twittos dénonçant les pourfendeurs d’une présumée apatridie, agitateurs qui connaîtraient, eux-mêmes, moins « la réalité des villages » que les techniques de « propagande » aveugle.Depuis des mois, des observateurs expriment des doutes sur le respect du calendrier électoral malien, la transition ne devant s’achever qu’après six scrutins. Pour se tenir en 2024, comme prévu, la présidentielle suppose un certain nombre de préalables sécuritaires, financiers, techniques, logistiques et humains. Le mois à venir éclairera sur le risque de glissement du calendrier, voire de changement de stratégie.
Source: Jeuneafrique