La première grosse bourde de la Transition malienne
Le Mali Koura est-il en train de devenir un leurre ou un slogan creux ? C’est la question qui est sur toutes les lèvres après l’attribution frauduleuse et népotique des logements dit sociaux. Jamais une attribution n’a suscité autant d’émois et de révolte que celle faite sous l’ère du Mali Koura, au point qu’on s’interroge aujourd’hui si le combat pour la refondation du Mali n’est pas seulement un slogan politique. Le Président de la Transition, premier responsable devant le peuple malien et devant l’histoire a su agir en annulant la procédure d’attribution et en dissolvant la fameuse commission chargée de recueillir les dossiers et d’octroyer les logements, conformément aux critères préétablis pour la circonstance, aux maliens de l’intérieur et de la diaspora. Cet acte du Président Assimi Goïta a été certes salué, mais il a laissé beaucoup de maliens sur leur faim, car il devrait être suivi de sanctions contre les auteurs et les commanditaires. Les enquêtes ouvertes vont-elles permettre de situer les responsabilités et par conséquent de sévir ? Cette grosse bourde ne va-t-elle pas entamer la crédibilité de la transition et donner des ailes à ses opposants ?
Sous d’autres cieux, les premières sanctions devraient tomber dès que l’on a constaté la véracité des faits. Autrement dit dès que le Président de la Transition s’est rendu compte que l’attribution des logements sociaux n’a pas été faite dans les règles de l’art, au nom du Mali Koura, les premiers responsables devraient être limogés et traduits, séance tenante, devant la justice. Au lieu de cela, on se contente tout simplement de la dissolution de la commission d’attribution et de l’annulation de la liste des bénéficiaires. Les membres de la commission d’attribution et certains bénéficiaires ne sont que des agneaux sacrificiels, les véritables coupables se promènent tranquillement comme si de rien n’était.
En revenant aux faits, il est inadmissible que ceux qui ont combattu IBK pour des pratiques aux antipodes de la morale et de l’orthodoxie, puissent être les premiers à faire du IBK sans IBK. Les membres du M5 RFP, le Mouvement de contestation qui est arrivé à bout du régime IBK, donne tout sauf une leçon d’exemplarité et de bonne gouvernance. Ceux parmi ses membres qui ont leurs noms sur la liste et qui occupent des postes de responsabilité ou bien qui sont à l’abris du besoin, ont simplement trahi l’esprit du combat. Des membres du cabinet du premier ministre, à ceux des cabinets ministériels en passant par des cadres du M5 RFP le mouvement à tout simplement trahi son serment celui qu’il a prêté devant le peuple ) la place de l’indépendance. Ce qui est encore aberrant c’est le fait pour certains d’avoir leurs noms sur la liste des maliens de la diaspora. Cet acte constitue en soi une fraude, un faux et usage de faux et une corruption. Que dire des enfants du premier ministre et ceux des grands barons du M5 RFP et du gouvernement ? C’est tout simplement un très mauvais message qu’on envoie aux maliens. Est-ce cela le Mali Koura tant chanté, tant vanté ? Cette bourde n’est-elle pas annonciatrice d’un lendemain compromettant pour la transition ? Le ¨Président Assimi Goita va-t-il finalement se décider à nettoyer les écuries d’Augias ? Il revient au Président Assimi, si tant est qu’il n’a pas d’autres agendas que celui du Mali, de rectifier le tir en ne se limitant pas seulement à des petites actions tape- à l’œil, mais en sévissant véritablement contre les responsables et leurs commanditaires. Pour rappel le Président Rwandais, Paul Kagamé a limogé un de ses ministres en plein Conseil des Ministres pour n’avoir pas justifié l’utilisation qu’il a faite d’un petit montant que même un planton pourrait payer. La question que l’on se pose est celle de savoir si l’éléphant du Mali Koura annoncé, en grands renforts médiatiques et discursifs, ne va pas arriver avec ses deux pieds cassés.
En somme, la balle est dans le camp du Président de la transition Assimi Goïta, lui qui a prêté serment devant Dieu et le peuple malien de respecter et de faire respecter la loi. Le Colonel qui est rentré par la grande porte de l’histoire va-t-il décevoir comme certains de ses prédécesseurs ?
Youssouf Sissoko
Source: L’Alternance