Créée le 27 octobre 1990 et appréciée par sa vaillance à l’avant-garde du mouvement démocratique, l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) est indexée aujourd’hui comme l’un des acteurs qui maintient l’Ecole malienne dans la diversion jouant sur la performance scolaire et transformant les facultés en Far West. Et cela à cause de fréquents affrontements pour le contrôle des bureaux de coordination. Des bastonnades à l’égard des élèves et étudiants, des tueries entre les membres même de l’association, la corruption, la manipulation politique… Que reste-t-il du mouvement estudiantin ? Nous avons posé la question à des parents, à des étudiants et à des enseignants ainsi qu’à des responsables de l’Aeem.
Lutter pour les meilleures conditions d’étude, défendre les droits des élèves et étudiants… Tels sont, entre autres, les raisons qui ont motivé la création de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM). «L’Aeem est une association revendicatrice des droits des élèves et étudiants. Elle est apolitique et milite pour la cause des élèves et étudiants maliens», affirma Seydou Touré, secrétaire général du comité Aeem de la Faculté des lettres, langue et science du langage (FLSL) au compte de l’année 2018-2019.
«L’Aeem revendique surtout. Nous sommes en quelque sorte la bouche et les oreilles de ceux qui nous choisissent», souligne Aboubacrine Moussa, secrétaire général de la Faculté de droit. Quand et comment le choix se fait ? Il y a d’abord une première élection au niveau des établissements secondaires et universitaires. Ce sont les représentants des diverses écoles qui votent pour un Secrétaire général national et les membres de la coordination sont constitués.
Le congrès est organisé chaque année, généralement au mois de décembre. Cela dépend aussi du bureau de coordination en place. L’Aeem est-elle toujours fidèle à la ligne directrice tracée par ses fondateurs ? C’est un noble engagement que de vouloir améliorer les conditions d’études et de simplifier le parcours scolaire et universitaire. Mais, la manière utilisée pour accomplir cette mission laisse de plus en plus à désirer.
Tout est loin d’être négatif dans le bilan de l’Aeem. Mais, les sorties, les altercations dans le milieu scolaire et universitaire ont terni l’image de l’association. Les affrontements violents ne datent pas d’aujourd’hui. Toutefois, les raisons diffèrent.
Pour de nombreuses personnes interviewées ; l’Aeem doit d’être un refuge de valeurs et non une source de frustration comme on le constate malheureusement ces dernières années. «Les éléments de l’Aeem jouent comme des comédiens d’une pièce de théâtre. Ils se prennent pour des lions dans la jungle avec la capacité de nous utiliser et nous mener à leur guise. Or, ils n’ont pas ce droit, pas surtout celui de nous maltraiter. Dans l’élaboration de nos dossiers, pour retirer nos bourses et trousseaux, pour s’inscrire ; on a toujours besoin de payer des sommes indus à l’Aeem dans nos différentes facultés. C’est un abus», déplore Ramatou, étudiante.
Sa déception est telle qu’elle ne voit plus l’utilité de cette association. «L’Aeem doit être dissoute ou mise en vielleuse le temps d’une prise de conscience pour une gestion responsable de l’organisation. Après, peut-être elle retrouvera la tranquillité et l’envie de bien faire sa mission», ajoute-t-elle.
Beaucoup de personnes accusent surtout l’Aeem d’être politisée et de cultiver la corruption au sein de la coordination. On se rappelle la remise d’une voiture aux membres de la coordination nationale lors d’une audience avec le président de la République suite à des revendications. Cela a suscité un débat au sein de la communauté estudiantine. «L’Aeem joue un rôle primordial pour la défense des droits des élèves et étudiants. Mais, elle peut être instrumentalisée à des fins politiques. Ainsi elle perd sa crédibilité», reconnaît un leader estudiantin.
«Vous savez, l’Aeem est apolitique, mais pas autonome parce qu’on a besoin d’autres personnalités et associations pour évoluer. Les politiciens sont des partenaires, on leur adresse des invitations, ils nous facilitent l’organisation de nos activités annuelles ; des sorties pédagogiques et des promotions avec d’autres partenaires», défend Aboubacrine Moussa.
Les parents sont naturellement inquiets pour la vie et pour l’éducation de leurs enfants. «Je suis consciente du fait que l’Aeem focalise aujourd’hui beaucoup d’accusations. Et cela à cause des actes posés par des personnes mal intentionnées dans le groupe, surtout celles qui n’ont pas assez d’expérience dans la coordination. Elles sont motivées par l’argent et le pouvoir qui les poussent à terroriser les enfants. J’ai été victime de tels comportements qui ternissent notre image… Des mesures sont prises pour faire face à cette situation, pour réduire voire éradiquer la corruption pour de bon», confie un responsable de l’organisation.
Pour redorer son blason et se donner une meilleure image, il faut que tous les élèves et étudiants s’impliquent dans l’assainissement du mouvement scolaire et estudiantin. Les parents et les autorités ont besoin de l’accompagnement et du soutien de l’ensemble des élèves et étudiants maliens pour redresser la barre et permettre à l’Aeem d’exécuter sa mission dans le respect et au seul bénéficie de ses militants !
AïchataFall
Stagiaire