Assemblée Nationale Vers une motion de censure contre le gouvernement

Le Mali fait face à l’une des plus grandes crises de son histoire, avec la rupture totale de confiance entre le Premier ministre et la classe politique dans son ensemble, les leaders religieux, les acteurs de la société civile et une frange majoritaire du peuple malien. Si jusque-là le Président de la République a pu résister à tout ce beau monde qui réclame sa démission, ce dernier est aujourd’hui poussé à son dernier retranchement avec la décision de son parti, le RPM, de rejoindre les rangs des frondeurs. Bien qu’ayant brandi la menace de la dissolution de l’Assemblée Nationale, IBK sait très bien que cette éventualité pourrait s’avérer encore beaucoup plus problématique que de se défaire d’un Premier ministre devenu encombrant.
Avant d’en arriver là, ce dernier peut faciliter les choses au Président de la République en décidant, par souci d’apaisement social, de remettre sa démission à celui-ci et de sortir par la grande porte.
Pour rappel, l’imam Mahmoud Dicko et le Chérif de Nioro ont juré de faire partir le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga. Ils sont rejoints en cela par des acteurs politiques, et pas des moindres. Aussi, les deux hommes, après un meeting, le 10 février dernier, étaient passés à la vitesse supérieure, le vendredi 5 avril 2019, à travers une grande marche ayant mobilisé des centaines de milliers de Maliens sur la Place de l’Indépendance. Par ailleurs, l’imam Mahmoud Dicko, nous apprend-on, a rencontré, le mercredi dernier, de nombreux militants d’associations et groupements de la société civile, au siège du Haut Conseil Islamique Mali. Au cours de cette rencontre, beaucoup d’intervenants avaient clairement fait savoir que les problèmes actuels du pays n’auront de solution qu’avec le départ, non pas de Soumeylou seulement, mais du Président IBK lui-même.
Quant à l’imam Mahmoud Dicko, il a commencé par féliciter le patriotisme et la loyauté de tous ceux qui ont répondu à l’appel du 05 avril sans causer aucun dégât. « Vendredi dernier (Ndlr : 05 avril), vous êtes sortis comme personne ne pouvait l’imaginer. Et sur place, contrairement aux pièges qu’on a voulu nous tendre, évitant l’image de déstabilisateurs avec laquelle certains ont voulu nous vêtir, vous avez su être à la hauteur en marquant l’histoire de mobilisation de ce pays de la plus belle manière… Je vous en remercie au nom du Cherif Bouyé Haidara de Nioro et de tous mes autres compagnons», fera-t-il savoir. Expliquant les raisons de la suspension de la sortie du vendredi 12 avril, il déclarera : « J’ai ressenti votre inquiétude par rapport à la décision de la suspension de la sortie prochaine, mais soyez rassurés que c’est juste une stratégie dans la lutte pour montrer notre bonne foi à l’opinion nationale et internationale… Après le meeting du vendredi 05 avril, nous avons reçu la visite d’une délégation de la famille fondatrice de Bamako. Ils nous ont demandé de surseoir à notre décision de sortir chaque vendredi. En retour, ces médiateurs se sont engagés à entamer des négociations entre nous et le régime. Nous avons donc jugé nécessaire de donner une chance à leur initiative. Il ne s’agissait nullement d’un recul, mais pour prouver notre bonne volonté… Les médiateurs ont très peu de temps pour accomplir leur mission. Dans le cas contraire, une nouvelle sortie aura lieu et qui, non seulement concernera chaque partie du Mali, mais risque d’être la dernière, car on réglera tout le problème, une bonne fois pour toute». Qu’est-ce que l’imam Dicko est allé discuter le dimanche dernier avec le Chérif de Nioro ?
Une seule certitude, lors de sa rencontre avec ses partisans et des acteurs de la société civile dont voici la teneur : « J’irai m’entretenir avec le Chérif de Nioro pour faire le point avec lui et décider ensemble de la marche à suivre. Cette décision vous sera communiquée dès mon retour». C’est dire qu’on ne tardera pas à connaitre les contours de cette visite chez le Chérif de Nioro.
En attendant, une motion de censure contre Boubèye est déjà fin prête à l’Assemblée Nationale. De ce côté-là, si Soumeylou pouvait résister à toutes sortes de tempêtes avec le soutien du RPM, tel n’est plus le cas depuis le week-end dernier, le parti ayant décidé de soutenir la motion de censure initiée par l’opposition. Aussi, d’aucuns trouvent que cette fronde guidée contre le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maiga est injuste et injustifiée, l’homme s’étant investi dans la gestion des problèmes du Mali en remettant un pays débout sous la direction éclairée du Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita. Pour ceux-ci, ce que les détracteurs du Premier ministre veulent aujourd’hui est anticonstitutionnel, le Président IBK étant élu par les maliens et à qui incombe le choix de son Premier ministre…
Salif Diallo