L’Assemblée nationale du Mali a été convoquée en session extraordinaire à partir du 11 mars 2017 par le gouvernement. L’adoption du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 constituait le point d’achoppement de cette session. L’adoption dudit projet de loi devrait être faite par les députés hier, jeudi 30 mars 2017 à travers une séance plénière. Mais, le projet n’étant pas en état, le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation, de la justice, des droits de l’homme et des institutions de la République, Me Zoumana N’Tji Doumbia a demandé à l’Assemblée nationale le renvoi à la session d’avril pour complément d’informations. Aux dires de Me Zoumana N’Tji Doumbia, une centaine de personnes ressources doivent être écoutées par la commission saisie au fond afin que le texte qui sera voté puisse être l’aspiration du peuple dans son intégralité et dans son entièreté. Mais d’ores et déjà, cette réforme constitutionnelle suscite une controverse.
La Commission des lois Constitutionnelles, de la législation, de la Justice, des Droits de l’Homme et des Institutions de la République, présidée par l’honorable Me Zoumana N’Tji Doumbia a été saisie pour l’étude au fond du dépôt n°2017- 16/5L, projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992. Au cours de la séance plénière d’hier, ladite Commission a demandé le renvoi de la présentation du rapport sur ledit projet de loi à la prochaine session ordinaire d’avril 2017 de l’Assemblée nationale pour complément d’informations. Les travaux étaient présidés par le président de l’Assemblée nationale, l’honorable Issaka Sidibé en présence des membres du gouvernement et d’autres personnalités.
Les raisons du renvoi
Me Zoumana N’Tji Doumbia a expliqué les motifs réels du renvoi. « La constitution est l’épine dorsale de la République, son examen mérite un processus inclusif. Ce processus a commencé au niveau de la commission loi, mais ce processus doit continuer. Nous avons une centaine de personnes ressources identifiées qui doivent être auditionnées au niveau de la commission. Nous avons prévus de faire des auditions citoyennes pour prendre l’avis des uns et des autres parce que nous voulons pour le plus inclusif possible », a-t-il dit. A ce stade actuel, dit-il, les auditions ont commencé mais n’ont pas beaucoup évolué, voila pourquoi la commission saisie au fond a demandé à la plénière de reporter l’examen de ce projet de loi à la session d’avril. « Cela permettra à la commission d’auditionner toutes les franges de la société, d’écouter les avis du citoyen malien pour que le texte qui sera voté puisse être l’aspiration du peuple dans son intégralité et dans son entièreté. Il faudrait que les uns et les autres comprennent qu’un débat à l’assemblée nationale n’est pas une caisse de résonance. Les députés ont le droit d’amendement. Après avoir écouté les uns et les autres, la commission, souverainement va décider, s’il y a lieu, d’apporter des amendements au texte qui nous ait soumis pour que les avis et les aspirations des uns et des autres puissent être prises en compte. C’est ce qui explique le report de l’examen qui doit permettre à la commission de travailler de façon plus inclusive et de prendre en compte l’avis des uns et des autres », a précisé l’honorable Zoumana N’Tji Doumbia. Et de poursuivre en disant que « les personnes ressources que nous avions voulues écouter ont demandé à ce qu’on puisse reporter leurs auditions parce que le texte est très important pour la vie de la nation et ça demande une étude approfondie à leurs niveaux pour venir faire une contribution de taille au niveau de la commission. Nous avons conscience de toute l’importance que revêt la constitution dans notre République.
En tout cas, nous nous donnerons le temps d’écouter tout le monde pour que personne ne soit mis en dehors du jeu démocratique qui est instauré au niveau de l’Assemblée nationale ».
Les réserves de la classe politique
Selon le communiqué du conseil des ministres du 10 mars dernier, le projet de loi de révision constitutionnelle prend en compte les clauses de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger, valorise les acquis des précédentes tentatives de révision constitutionnelle et corrige les insuffisances de la Constitution du 25 février 1992. Le projet de loi proclame la volonté du peuple malien de préserver et de renforcer les acquis démocratiques de la Révolution du 26 mars 1991, les principes intangibles de l’intégrité territoriale, de la souveraineté nationale, de la forme républicaine et de la laïcité de l’Etat. Les Institutions de la République sont au nombre de huit dans l’ordre de prééminence suivant : le Président de la République ; le Gouvernement ; l’Assemblée nationale ; le Sénat ; la Cour constitutionnelle ; la Cour suprême ; la Cour des Comptes ; le Conseil économique, social, culturel et environnemental. La Haute Cour de Justice ne figure plus parmi les Institutions de la République mais elle demeure compétente pour juger le Président de la République et les ministres mis en accusation devant elle par le Parlement pour haute trahison , crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’Etat. Le projet de loi crée un parlement composé de deux chambres : l’Assemblée nationale et le Sénat. A en croire le communiqué du conseil des ministres, le projet de loi n’entraine pas un changement de République, ne remet pas en cause la durée et le nombre du mandat du Président de la République.
Cependant des membres de l’opposition à l’URD disent n’avoir pas été associés ni consultés pour la mise en place du comité d’experts chargé d’élaborer l’avant-projet de loi de révision de la Constitution qui était piloté à l’époque par Me Mamadou Ismaël Konaté, actuel ministre de la justice, des droits de l’homme, garde des sceaux. L’opposition, à travers, le premier vice-président du parti pour la renaissance nationale (Parena), Me Amidou Diabaté, lors d’un débat sur Africable, a souhaité la pacification du pays plutôt que de réviser la constitution. Selon lui, le projet de loi de révision constitutionnelle devrait figurer parmi les préoccupations de la conférence d’entente nationale, qui a ouvert ses portes le 27 mars dernier et prendra fin le 2 avril prochain. Pour sa part, l’ancien premier ministre du Mali, Soumana Sako, président d’honneur du parti CNAS Faso Hèrè rejette catégoriquement cette révision constitutionnelle. En outre, Bandiougou Kourouma, le président du « Collectif plus jamais ça », au cours d’une conférence débat a émis des réserves en indiquant qu’il était nécessaire de beaucoup sensibiliser autour de cette révision constitutionnelle.
Aguibou Sogodogo
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