L’état de saleté de la ville de Bamako est une évidence qui saute aux yeux et aux narines de tout un chacun. Outre ses impacts esthétiques et sanitaires, cet environnement malsain hypothèque la qualité de nos sols, de nos ressources en eau et notre développement économique, notre pays, selon Mme le Premier ministre, en supportant les conséquences par «des pertes de plus de 20% de notre PIB (soit 864 milliards de FCFA, sur la base du PIB 2009, qui était de 9 milliards de dollars). Ces conséquences se manifestent aussi par des centaines de décès par an, des milliers de journées de travail perdu et des millions de FCFA engagés chaque année par les ménages en dépenses de santé».
Le Mali est pourtant bien doté par la nature, nos ressources en eau renouvelable par habitant et par an étant estimées à 11 000 m3 et la valeur de référence mondiale en terme de pénurie d’eau étant de 1 000 m3 par personne et par an. Ce sont le gaspillage, la gestion non rationnelle, la sédimentation ou l’ensablement des cours d’eau, lacs et autres mares et les pollutions diverses et variées qui sont les principales menaces qui pèsent sur la disponibilité et la qualité de ces ressources hydriques.
Caractérisé par une urbanisation galopante et, comme le reste du pays, par un taux de fécondité élevée, le District de Bamako brille aussi par un taux de croissance annuel de 5,6%, ce qui classe notre capitale comme 1ère en Afrique et 6ème au plan mondial dans ce domaine. C’est dire que, si nous ne voulons pas disparaître sous les déchets solides et liquides que nous produisons, ainsi qu’éviter les dérapages violents liés à la gestion de nos ordures, il urge de prendre le taureau par les cornes. La Banque Africaine de Développement a donc financé, à hauteur de 800 millions de FCFA, une étude pour la définition d’un Schéma directeur de drainage des eaux pluviales et d’évacuation des eaux usées du District de Bamako. Comme l’a souligné Samba Kamara, Chargé des Opérations de la BAD au Mali, lors de la table-ronde «cette étude vient, d’une part, actualiser le volet assainissement des déchets liquides du Plan Directeur d’Assainissement de Bamako et, d’autre part, compléter l’étude réalisée sur la gestion des déchets solides».
Ces études ont permis de définir le programme prioritaire dont le financement était soumis à nos partenaires techniques et financiers, au premier rang desquels, outre la BAD dans le rôle de chef de file, l’Allemagne, chef de file des PTF dans le secteur de l’eau et de l’assainissement. Le SDAB devra, à terme, permettre de remédier à l’insalubrité qui résulte de l’insuffisance des moyens d’assainissement dans notre capitale, à réduire drastiquement la pollution des sols, des eux et de l’air liée aux activités industrielles et artisanales et à gérer au mieux la masse importante de déchets domestiques de toute nature produits quotidiennement à Bamako, surtout dans les quartiers spontanés et les zones d’urbanisation anarchiques.
Selon les études menées par une consultante de la BID (Banque islamique de développement), un cabinet-conseil recruté par l’AFD (Agence française de développement) et l’ANGESEM (Agence nationale de gestion des stations d’épuration du Mali), 89% des ménages bamakois évacuent séparément leurs eaux usées vannes et leurs eaux grises. Ces eaux grises domestiques aboutissent fréquemment dans la rue (35,4% des déversements). Plus de 90% des ménages disposent de latrines ou de fosses septiques, ce qui constitue un très bon point au plan sanitaire. C’est lorsqu’il faut vidanger ces structures que de gros problèmes, financiers pour les familles et d’épandage pour les Spiros, se posent. Pour le drainage des eaux pluviales, le réseau actuel, long de près de 900 kilomètres, est surtout constitué de caniveaux, en grande partie non couverts. Conséquences: rejets solides et liquides divers s’y retrouvent, y compris les cadavres d’animaux, les liquides vidangés par les garages et même le contenu de certains puisards. En outre, non curés régulièrement et dotés d’une pente insuffisante, ces «fossés», où stagnent tous ces détritus, sont des élevages de moustiques et de rongeurs. Sans compter qu’ils polluent la nappe phréatique, profonde de seulement un mètre dans certains endroits de notre capitale.
C’est fort de tous ces constats que le SDAB a été formulé, grâce à l’appui financier de la BAD, par un groupement de bureaux de consultants allemands et tunisiens, en association avec le bureau malien SETA L’étude, finalisée en février 2009, a retenu d’équiper, à l’horizon 2017, 55% de la superficie totale de Bamako (9 497 hectares) d’un réseau séparatif conventionnel centralisé et 45% (7 877 hectares) en systèmes d’assainissements individuels. Deux stations d’épurations seront établies sur chacune des rives du fleuve Niger, sur une superficie unitaire de 25 hectares. La tranche prioritaire objet de la table-ronde des bailleurs de fonds ambitionne d’assurer le branchement de 35% de la population bamakoise à un réseau conventionnel. 32% de la superficie de la capitale sera concernée, soit 5 543 hectares, ainsi que 37% de sa population. C’est la rive droite, la plus peuplée de la capitale, qui sera mise en chantier. Nous reviendrons sur cet important programme dans une prochaine édition.
Ramata Diaouré
Le 22 Septembre 30/11/2011