Le mal qui lui est reproché, par ceux qui en veulent à sa liberté, ne se résume pas à son militantisme jugé excessif au profit du Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et la république (FDR), mais concerne aussi son passé de cadre et ministre CNID qui a démissionné de ce parti, alors qu’il y jouissait d’une grande influence. Le départ du ministre Ndiaye Bâ, entrainait alors la démission de plusieurs dizaines de militants et cadres du CNID qui rejoindront plus tard le parti des amis de l’ancien Président Amadou Toumani Touré.
Le FDR, un front constitué d’anti-putsch créé au lendemain du coup d’Etat du 22 mars 2012, a vite constitué un obstacle insurmontable aux putschistes et aux regroupements satellites articulés autour de l’ex junte qui a renversé le pouvoir du Président ATT. Le coup d’Etat a certainement provoqué une recomposition du paysage politique malien, de ce fait au sein du FDR se sont retrouvés des partis qui n’étaient pas du même bord sous le Président ATT. Cependant cette recomposition n’a pas permis à Ndiaye Bâ, devenu Vice-président du PDES, de retrouver ses anciens amis du CNID, un parti qui n’a pas été du bord anti-putsch. Alors s’applique l’adage « l’ami de mon ennemi est mon ennemi ».
De son côté, les velléités sans cesse exprimées du Premier ministre de la transition de briguer la magistrature suprême en 2013 vont de pair avec ses manœuvres d’utilisation abusive de l’appareil d’Etat à des fins partisanes, notamment en plaçant partout ses militants au sein des postes clés des ministères et des directions. Cet élan mégalomaniaque comporte aussi son autre facette qui est la chasse aux sorcières. Les cadres du FDR qui ont disposé d’une portion du pouvoir sous ATT doivent se le retenir pour avertis. Il ne vous sera pas donné le temps d’aller prendre la couverture à la maison ou de voir votre avocat. Comme Ndiaye Bâ, si la tendance continue, il n’y a de place qu’au lycée central correctionnel de Bamako-coura, la maison centrale d’arrêt.
Inculpé par le juge d’instruction Yaya Karambé du pôle économique, Ndiaye Ba a été déféré à la Maison centrale d’arrêt de Bamako, le mardi 6 novembre, sans avoir eu à parler à son avocat. L’affaire concerne des malversations à l’Office malien du tourisme et de l’hôtellerie (Omatho). Des cadres, ainsi que deux anciens directeurs généraux avaient été accusés de détournements de biens publics et mis sous mandats de dépôt en septembre dernier.
L’ex-DG, Oumar Balla Touré, relevé de ses fonctions depuis fin 2010 par l’ancien ministre Ndiaye Ba a été convoqué par la justice en septembre dernier dans le cadre de l’audit de l’Omatho. Selon notre confrère Les Echos du mercredi 7 novembre, « il lui est reproché un manque à gagner de 500 millions de F CFA et des fausses procurations délivrées à des hôtels qui n’ont jamais été réglées. L’interpellation de M. Touré a été suivie de celles de son successeur Mamadou Kéita et de l’ex-DAF Abdramane Kéita. Tous les trois sont depuis lors gardés à la maison d’arrêt en attendant leur jugement ». Ndiaye Bâ a dirigé le ministère de l’Artisanat et du Tourisme à la même époque (de 2003 à 2012). Entre la responsabilité de l’ancien ministre et les représailles politiques contre lui, il n’y a qu’un pas.
B. Daou
Le Républicain 08/11/2012