Le Procureur général près la cour d’appel de Bamako, Mamadou Lamine Coulibaly s’est expliqué, après les manifestations du mercredi 17 août 2016 au Tribunal de grande instance de la commune IV du district de Bamako, suite à l’arrestation de Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath, animateur de radio. Cette explication lors du Jt de 20 h de la télévision nationale, n’a rien apporté comme précision, et en a au contraire rajouté à la confusion au niveau des Maliens.
Sans pouvoir convaincre sur les motifs de cette arrestation, l’homme de droit a eu toutes les peines sur le plateau, ne trouvant même pas d’arguties pour justifier sa présence à l’Ortm, donnant l’image d’un homme désemparé, après l’usage de la force ayant fait des victimes dont en vie humaine. Sans parler d’enquête concernant cette victime, le procureur se penche sans vergogne sur les pertes matérielles : « rien ne peut justifier cette inconduite et rassurez-vous, les auteurs et les complices seront cherchés et traduit en justice et la loi s’appliquera dans toute sa rigueur », a-t-il dit sur l’Ortm, parlant des dégâts matériels, comme s’ils étaient plus importants que la vie humaine.
«Depuis quelques temps, l’on assiste à un lynchage médiatique sur certaines ondes de radio. Puisque ça ne pouvait pas continuer, j’ai décidé d’ouvrir une enquête contre monsieur Mohamed Youssouf Bathily. Enquête que j’ai confiée au service d’investigation judiciaire de la gendarmerie qui fait un bon travail. Et dès que ce service va finir l’enquête, le dossier sera transmis à un procureur qui va poursuivre, orienter le PV (Procès verbal). Depuis quelques temps, on a remarqué que Mr Bathily s’adonne à des déclarations qui offensent la pudeur, et qui heurtent le sentiment national, des particuliers qui en sont témoin sans avoir cherché à l’être. Ces faits et comportements sont prévus et réprimés par le code pénal », a souligné le Procureur général près la cour d’appel de Bamako, Mamadou Lamine Coulibaly. Le PG aurait pu au moins dire, ne serait-ce que les faits pour lesquels, il a décidé ce jour précis de mettre aux arrêts, celui qui mobilise étant en prison que lui et son code pénal. De quelle pudeur et de quel sentiment national parle vaguement le procureur général, sans être convaincu lui-même de ce qu’il vient raconter à la télévision nationale, parce que « envoyé par le ministre », comme il le dit si honnêtement ? Nous n’avons pas connaissance, d’une plainte, ni d’un droit de réponse demandé par des citoyens se sentant lésés, contre Ras Bath. Qui se rappelle d’une émission demandée par un citoyen sur la radio Maliba pour aller répondre aux allégations de Ras Bath, dont on sait d’ailleurs qu’il a la grande gueule et fait des coups de gueules.
Mais est-ce une raison pour lui casser la gueule. Franchement, nous avons eu l’impression d’avoir devant nous un procureur venant d’une autre planète, qui ignore tout de notre histoire récente qui a vu asseoir et se consolider la démocratie au Mali. Que dire des ceux qui ont pris le risque d’inscrire dans notre histoire cette atteinte aussi grave que la suspension des réseaux sociaux qui sont devenus un repère de la vivacité d’une démocratie, qui a le propre de déjouer les vols électoraux à grandes échelles et d’autres pratiques arbitraires, d’informer et de sensibiliser. A moins qu’on ne nous dise qu’on tombe dans un régime nord coréen et qu’on suspende la constitution, selon laquelle la vie humaine est sacrée et inviolable. Pourquoi autant de faciliter à tirer sur la gâchette sur des Maliens en ville, qui paient leurs impôts, comme on tire sur des ennemis au front ? A moins qu’on nous dise que nous n’avons plus le droit d’avoir des opinions, et qu’on ne doit plus s’exprimer. Voulez-vous prendre une ordonnance Monsieur le Procureur Général, pour fermer radios et journaux ? Faites-le donc pour avoir des expressions autres, mais à la dimension de vos actes.
Et le magistrat de poursuivre en affirmant : « Nous avons décidé d’arrêter l’hémorragie parce que ça ne pouvait pas continuer et nous avons ouvert une enquête qui a abouti à sa garde à vue et le délai de garde à vue sera scrupuleusement respecté, naturellement s’il y a lieu de prolonger on le fera». Selon Mamadou Lamine Coulibaly, le parquet prendra toutes ses responsabilités dans cette affaire comme dans toutes les autres affaires. De quelle hémorragie parle-t-on ?
Pourquoi avoir attendu tout ce temps pour mettre fin à cette hémorragie?
Le Procureur répond en disant que Ras Bath fait des déclarations depuis quelques temps mais il fallait attendre que ces déclarations atteignent une certaine proportion. Avant d’ajouter que le Mali est un peuple de tolérance, de dialogue mais aussi un peuple qui a des repères, des repères à ne pas franchir. « C’est pourquoi nous avons attendu que ça heurte la conscience sociale pour agir. Le parquet a pour devoir et obligation essentielle de protéger la société que nous défendons, c’est pour cette raison qu’il a été interpellé et gardé à vue. Des déclarations au delà de l’outrage à la pudeur, ce sont des déclarations et des propos qui sont de nature à outrager les agents de l’Etat qui sont dans l’exercice de leurs fonctions.
Ça ne peut pas perdurer. Quand vous entendez des déclarations et des propos qui sont de nature à démoraliser nos troupes, ceux là qui sont au nord qui sont là pour la protection de la société, qui sont là pour la défense de l’Etat, il est inadmissible de laisser passer de telles propos et c’est pourquoi nous avons décidé d’arrêter », a-t-il insisté.
Selon le Procureur général, Ras Bath n’est pas poursuivi pour des délits de presse mais pour des délits de droit commun. « Nous n’avons rien contre la presse. Nous sommes dans un pays qui respecte les droits. La liberté d’association, la liberté d’opinion et d’expression seront garanties et nous y veillerons. Nous respecterons ces droits. Maintenant, nous n’accepterons pas que certaines dérives s’installent dans la société. Et chaque fois que cela va commencer, on va arrêter », a indiqué le procureur. Aux dires de Mamadou Lamine Coulibaly, Ras Bath intervient en qualité d’animateur mais les propos et déclarations qu’il poursuit ne relèvent pas de ces domaines. « Les propos et déclarations relèvent du droit commun et c’est ce que nous poursuivons pour le moment. Peut être que d’autres poursuites pourront venir après. Voila les faits que nous poursuivons », a précisé le procureur général. Ces propos du PG interpellent les hommes de médias, les associations de presse au Mali sur leur devoir de défense et de protection des hommes de presse. C’est à dormir debout, comment peut-on dénier à un homme de radio, qui collecte, recoupe, traite et diffuse des informations, la qualité d’appartenir à la grande famille de la presse. L’Urtel est interpellé en particulier, ainsi que la Maison de la presse du Mali, et toutes les associations de presse, toutes les organisations et associations de défense des droits de l’homme, car c’est un homme de media, n’en déplaise à Monsieur le PG.
S’agissant de la manifestation qui a causé des dégâts, le procureur s’est indigné que c’est une perte sèche pour le Mali et pour le contribuable malien car, dit-il, les bureaux, les livres et codes de travail des magistrats sont incendiés et il va falloir les remplacer avec l’argent du contribuable. « Il faut respecter le contribuable, il faut éviter de telles situations mais rassurez-vous, les gestes de ce matin (Ndlr, mercredi 17 août 2016 dans la matinée) ne se justifie. Rien ne peut justifier cette inconduite, et rassurez-vous, les auteurs et les complices seront cherchés et traduit en justice et la loi s’appliquera dans toute sa rigueur ». Parole de Procureur.
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