Aminata Wassidjé Traoré, le sens du mariage Valeur montante de la scène malienne

C’était il y a presque un an : Aminata Wassidjé Traoré s’était distinguée en organisant l’opération « Tam tam pour un cahier d’écolier », destinée à acquérir des fournitures scolaires pour les distribuer aux enfants arrivés dans la précipitation, sans rien, aux abords de la capitale malienne. Ceux-ci avaient été contraints de fuir le Nord du pays avec leurs familles en raison du conflit qui y sévissait.

Pour se lancer dans une telle entreprise de bienfaisance, la jeune femme trentenaire pouvait s’appuyer sur sa notoriété acquise patiemment, presque discrètement. Preuve que le renouvellement de la scène musicale malienne s’opère aussi à l’écart des projecteurs braqués par les acteurs du marché international, même si ceux-ci ne sont jamais loin. A l’image de son premier album Tamala paru en 2009 à l’échelle locale et aujourd’hui commercialisé sur le plan international.

Une montée en puissance confirmée par un faisceau d’indices concordants : en 2010, “Ami”, comme la surnomment ceux qui la côtoient, représentait son pays à Cotonou, au Bénin, lors du Festival des Stars de l’Intégration Culturelle Africaine. On la retrouvait pour l’édition 2011 du Festival sur le Niger, à Ségou, événement culturel majeur qui accueille les vedettes nationales que sont Oumou Sangaré, Toumani Diabaté, Amadou & Mariam… Il y a aussi ces multiples apparitions dans le programme télévisé très regardé Top Etoile, de l’ORTM, ou encore sa participation en 2008 au projet Sept étoiles de Diré réunissant quelques artistes de cette ville de la région de Tombouctou, comme Samba Touré – pour lequel elle a joué les choristes dans le cadre de son récent album Albala.

Tombé sous le charme au cours d’un de ses séjours au Mali, le guitariste et producteur américain Chris Eckman (Tamikrest, Samba Touré, Lobi Traoré…) décide de l’inviter en 2012 sur une des compositions que son collectif Dirt Music enregistre pour l’album Troubles. “En studio, elle nous a complètement estomaqués. Elle est arrivée, a écouté la moitié du morceau et nous a dit qu’elle était prête à chanter. Elle a improvisé toute la partie chantée de La Paix, en une seule prise ! Ce qui est d’autant plus remarquable que le texte lui-même a vraiment du sens, une résonnance particulière. Et bien sûr sa voix est soulful, parfaite”, raconte l’ex-Walkabouts qui continue à suivre de près les projets musicaux de la jeune femme.

Si Aminata Wassidjé Traoré ne donne pas l’impression de suivre un plan de carrière, obéissant davantage à ses envies en fonction des opportunités, sans chercher à accélérer le cours du temps, elle sait tout de même forcer le destin : quand elle, la fille de paysans, quitte sa terre natale pour Bamako en 2002 alors qu’elle a à peine plus de vingt ans, c’est « pour apprendre », résume-t-elle.

La seule façon de poursuivre son rêve d’enfant passe par cet exode volontaire, ou plutôt ces incessants allers et retours car elle avoue avoir besoin de se ressourcer fréquemment chez elle. A Bamako, elle s’est mise à gagner sa vie en se produisant lors des mariages, d’abord avec le groupe Farafina Lolo puis avec ses propres musiciens.

On vante ses qualités sur scène. Sur le conseil de son compatriote Adama Yalomba, elle tente l’aventure personnelle, trouve une voie entre la modernité de son époque, de sa génération, et la richesse de sa culture songhaï, aidée en cela par Baba Simaga qui réalise ses premiers enregistrements.

Le second album en cours d’élaboration devrait être, selon son auteur, dans la continuité de la chanson Tamala, où instruments traditionnels et programmations trouvaient un terrain de jeu commun. À moins que d’ici là, l’intérêt suscité par Aminata l’entraine dans une autre direction.

RFI  2014-01-1118:33:06