L’Algérie, principal acteur de ce front commun contre le terrorisme, ne cesse d’appeler ses autres partenaires à unir leurs forces et à faire preuve de bonne volonté pour éradiquer cette menace avant que cela ne soit trop tard.
Publiquement, cette recommandation requiert l’assentiment de tous les membres du Comité opérationnel conjoint installé à Tamanrasset, mais dans la pratique habituelle et les coulisses diplomatiques la chose n’est pas tout à fait admise. En Mauritanie, on préfère parler de banditisme et de voleurs de bétail. Minimisant le problème, des officiels mauritaniens estiment en aparté qu’il se résume à contenir de simples réseaux mafieux en faisant valoir leur droit à poursuivre «les délinquants» dans leur fuite vers les pays voisins. Au Niger, où l’Etat fait face régulièrement à de violentes rebellions, toute la responsabilité se trouve automatiquement rejetée sur les opposants au régime en place.
Une posture qui semble vouloir profiter de cette dramatique réalité pour solder de sordides contentieux politiques internes. La position du Mali est encore plus ambiguë. Si, officiellement, l’Etat malien affiche une certaine disponibilité à collaborer dans le bon sens avec ses voisins, concrètement, il constitue le principal refuge des hordes terroristes. Tous les étrangers enlevés dans les pays riverains transitent par la région tendue du Nord-Mali où ils sont généralement séquestrés en attendant l’aboutissement des médiations pour le payement des rançons.
Curieusement, des officiels (ministres, députés et notabilités locales) se bousculent à chaque fois pour mener ces négociations. Les connaisseurs de ce dossier parlent de commissions assez conséquentes qui font languir le personnel politique local. Pour se couvrir de la légitime suspicion conséquemment entretenue à leur égard, le président malien et ses proches collaborateurs soufflent depuis quelque temps le chaud et le froid. Tantôt, ils accusent le «pesant» leadership algérien au sein de la naissante coalition antiterroriste, tantôt, ils mettent en avant une prétendue passivité des autres pays membres.
Parfois, ils proposent d’élargir le fameux Comité opérationnel conjoint (COC) à d’autres pays non concernés directement par la menace. Puis, c’est l’implication directe des pays occidentaux qui est sollicitée. A la longue, ce jeu enfantin a fini par lasser les chancelleries étrangères qui, à un certain moment, accordaient un semblant d’attention à toutes ces incohérences. Aujourd’hui, cette partie de cache-cache est, semble-t-il, terminée. Les notes diplomatiques américaines, divulguées par le site internet WikiLeaks, révèlent que le département d’Etat s’est clairement rendu compte de la supercherie malienne. Considéré comme le talon d’Achille de la lutte antiterroriste dans la région, Bamako est implicitement montré du doigt pour ses tergiversations insensées.
De nombreux pays occidentaux le somment de se montrer un peu plus sérieux, faute de quoi il risque de perdre les aides au développement qui lui sont octroyées. Le Mali tout comme les autres membres du COC, ont intérêt à coordonner leurs efforts et à mettre de côté leurs rivalités et leurs jalousies. L’éradication du péril terroriste est une délicate mission qui exige une coopération de tous les instants et une solidarité à toute épreuve. Cela n’a rien d’une partie de cache-cache.
Source la Tribune 10/12/2010