Selon Ousmane Diarra, le président de l’Association Malienne des Expulsés (AME), contrairement au démenti du ministère des affaires étrangères, c’est bien l’accord de réadmission qui a été signé entre le Mali et l’Union Européenne(UE) lors de la visite du ministre néerlandais Bert Koenders au Mali dans le cadre du dialogue de Haut Niveau sur les questions migratoires initié entre le Mali et l’UE depuis le Sommet de La Valette sur la migration. Dans l’accord signé, soutient le président de l’AME, les fonctionnaires maliens vont identifier les sans papiers maliens en Europe pour faciliter leur expulsion. L’Association Malienne des Expulsés prépare donc, selon son président, une grande mobilisation dans les jours à venir contre l’accord signé pour la première fois entre un pays africain et l’UE.
Selon le président de l’Association Malienne des Expulsés, c’est un accord qui a été bien et bel signé hier (ndlr le dimanche 11 décembre 2016) entre l’Union Européenne et le Mali. « Dans le contenu de l’accord, les fonctionnaires maliens vont identifier les sans papiers maliens en Europe pour faciliter leur expulsion. C’est dans les clauses de l’accord de réadmission. C’est un accord qu’on a dénoncé il y a très longtemps. Il a été signé en 2000 lors d’une rencontre au bénin (l’accord de Cotonou). Dans son article 13, il y a un accord entre l’Union Européenne et les pays ACP sur la réadmission des non nationaux », déclare Ousmane Diarra, le président de l’Association Malienne des Expulsés interrogé par Le Républicain.
De l’avis de l’Association Malienne des Expulsés, cet accord est la suite logique du Sommet de la Valette qui a réuni, du 11 au 12 novembre 2015, les chefs d’Etat européens, africains, les chefs d’institution régionale, sous-régionale et mondiale (Union européenne, Union africaine, CEDEAO, OIM, ONU) autour de l’épineuse question de la migration. Les dirigeants présents au Sommet ont adopté une déclaration politique et un plan d’action visant à: s’attaquer aux causes profondes de la migration irrégulière et des déplacements forcés ; approfondir la coopération en matière de migration légale et de mobilité ; renforcer la protection des migrants et des demandeurs d’asile ; prévenir et s’attaquer à la migration irrégulière et à l’exploitation et au trafic des migrants et coopérer plus étroitement en ce qui concerne les retours, les réadmissions et les réintégrations.
« Donc c’est une collaboration entre l’Union Européenne et le Mali. Cela va faciliter l’expulsion légale des Maliens sans papiers dans tous les pays de l’UE. C’est la première fois que l’Union Européenne établit des tels engagements avec le Mali dans le cadre du Sommet de la Valette », explique Ousmane Diarra qui promet, dans les jours à venir, une grande mobilisation de la société civile malienne contre l’accord signé.
Le dimanche passé, des informations ont fait état de la signature d’un accord, lors de la visite du ministre néerlandais Bert Koenders au Mali, entre l’Union Européenne et le Mali pour favoriser le retour des demandeurs d’asile dans leur pays. Des informations vite démenties par le ministère des affaires étrangères et de la Coopération Internationale qui parle plutôt d’un simple « communiqué conjoint…Et nulle part, il n’a été question de signature d’un quelconque accord qui permettrait d’expulser nos compatriotes en situation irrégulière en Europe.» « Un communiqué conjoint n’a pas la valeur juridique d’un accord en droit international », assure le ministère des affaires étrangères du Mali.
Le démenti de la partie malienne cache mal un flou (artistique ?) dans le communiqué commun qui a sanctionné la visite de Bert Koenders au Mali et qui est disponible sur le portail électronique de l’Ambassade des Pays Bas au Mali. Ce communiqué commun indique : « les deux parties se sont félicitées d’une intensification de la coopération en matière de migration depuis le dialogue de Haut Niveau de 14 avril 2016, tout en constatant des initiatives concrètes, une mobilisation de ressources importante et des premiers résultats encourageants. À travers le « Fonds fiduciaire d’urgence en faveur de la stabilité et de la lutte contre les causes profondes de la migration irrégulière », neuf projets ont été approuvés pour un montant total de 145.1 millions d’euros, dont trois initiatives régionaux (pour 53.6 M) et six projets qui ciblent le Mali (91.5 M). Il s’agit notamment des initiatives de création d’emploi, d’appui aux investissements de la diaspora malienne, de sécurité et développement au Nord du Mali et du renforcement de la résilience et l’accès aux services de base. »
« Accord sur les domaines d’une coopération renforcée … »
Comme résultat concret du Dialogue de Haut Niveau sur la Migration de 11 décembre 2016, indique le communiqué conjoint, les deux parties ont marqué leur accord sur les domaines d’une coopération renforcée, en prévoyant des actions prioritaires dans des domaines d’intérêts partagés, à intégrer dans une Feuille de Route conjointe. « Les domaines prioritaires sur lesquels les deux parties envisagent de renforcer leur collaboration sont la création d’emploi pour les jeunes dans les régions de départ et d’origine des migrants; le renforcement des systèmes cohérents et robustes de registres d’état civil, ainsi que la délivrance des cartes d’identité et passeports sécurisés et l’utilisation des passeports biométriques; la gestion des frontières et un meilleur contrôle du territoire; la protection des migrants en transit au Mali et la lutte contre la traite des êtres humains et les ¨passeurs¨; l’accompagnement des retours d’Europe des personnes en situation irrégulière, sur la base des procédures standard, conclu entre les deux parties tout en respectant leurs obligations mutuelles. Les deux parties ont également mis un accent particulier sur le respect des droits de l’homme des personnes concernées. » Et les deux parties se sont mis d’accord « de mettre en place une structure appropriée de concertation locale, sous l’égide du gouvernement du Mali et avec la pleine participation de la partie européenne, pour permettre de coordonner les différentes actions et programmes dans le cadre de la coopération sur les questions migratoires, et pour en assurer la cohérence avec les orientations stratégiques nationales. »
Madiassa Kaba Diakité