Abdel Karim Konaté, ministre du Commerce : Faire en sorte que le Mali compte dans les échanges internationaux

Abdel Karim Konaté, ministre du Commerce du Mali.

Le Mali est un pays de commerce par excellence. Mais la balance commerciale du pays reste déficitaire. Pour inverser cette tendance ou du moins faire en sorte que le Mali puisse compter dans les échanges internationaux, le ministre du commerce, Abdel Karim Konaté nourrit un optimisme contagieux. Invité du 28ème numéro de l’émission « Action Gouvernementale » de l’Office de radiodiffusion et télévision du Mali (Ortm), le dimanche 23 octobre 2016, le ministre Abdel Karim Konaté dit ‘’Empé’’ a insisté sur ce qui apparait comme un défi du gouvernement malien : faire en sorte que le Mali puisse compter dans les échanges internationaux. Il a en outre, abordé entre autres, des questions relatives à l’interdiction de la viande de volaille depuis 2009, l’acquisition des loyers à bas prix dans les prochaines années, l’interdiction d’exporter du bois.

Le sens du devoir d’informer des journalistes qui l’animent et le choix des invités de cette émission « Action Gouvernementale », ont fini par l’imposer comme une tribune phare de la télévision nationale. Il arrive qu’un ministre en sorte effiloché comme une poule mouillée, d’autres se battent comme un beau diable pour convaincre les téléspectateurs, les décideurs et le Président de la République, que la situation est sous contrôle en ce qui concerne le ministère concerné, qu’ils font le boulot comme ça se doit et que par conséquent, ils sont l’homme qu’il faut. Les journalistes Yaya Konaté et Sidiki Dembélé dans une parfaite courtoisie, de par leur devoir d’informer ont su imposer le respect de leurs invités pour cette émission « Action Gouvernementale ». Face à leurs questions sans détour, le ministre du Commerce, Abdel Karim Konaté, un douanier averti a tenu de bout en bout, comme droit dans ses bottes.

Comment se porte aujourd’hui le commerce au Mali ? Quelle place occupe notre pays sur le plan régional et sous régional en matière commerciale ? Quelle mesure de protection pour les consommateurs maliens ? Que joue le commerce dans l’économie nationale ? Voila autant de questions qui étaient données au ministre Abdel Karim Konaté de répondre.

Selon le ministre, le tarif douanier est le premier élément de politique commercial d’un pays, et la collaboration entre douaniers et commerçants se passe bien. « Le Mali est un pays de commerce. Et le commerce a fondamentalement un impact sur le pays. En 2015, le commerce qui est dans le secteur tertiaire a contribué dans le PIB (produit intérieur brut) à près 11%. Le Mali a des choses à offrir sur le plan commercial, nous avons le bétail, le coton, l’or… Chaque année nous exportons 500 000 tonnes de coton », se défend il. Cependant, la balance commerciale du Mali est déficitaire, le pays importe plus qu’il n’exporte.

40 000 tonnes de mangues exportées

Mais cette importation ne concerne pas essentiellement que des biens de consommation, une grande partie des importations est destinée à l’investissement, selon le ministre Abdel Karim Konaté. « Nous avons un besoin de consommation du riz de 900 000 tonnes par an et la production locale avoisine les 500 000 tonnes, nous importons entre 200 et 250 000 tonnes par an. Nous avons fait des progrès dans le domaine du sucre. Nous avons deux unités industrielles du sucre qui produisent 100 000 tonnes par an, les besoins de consommation varient entre 175 000 tonnes à 200 000 tonnes », a précisé le ministre.

Soutenant que l’objectif de tous les ministres est de faire en sorte que le Mali puisse compter dans les échanges internationaux, il a apprécié les 15% du budget national alloués au secteur de l’agriculture. Pour le ministre, le Mali compte dans l’espace d’intégration économique, car il est le troisième pays économique de l’UEMOA après la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Le ministre a mis l’accent sur la nécessaire diversification de l’offre des produits d’exportation.

Mettant l’accent sur les avantages à être membre de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) qui compte plus de 164 pays, le ministre a souligné que le Mali a exporté 40 000 tonnes de mangues en 2015. Notre pays peut vendre ses produits dans les territoires de l’OMC tout en respectant les normes.

Les revenus augmentent de 50 milliards de FCFA

Pour ce qui concerne l’approvisionnement du marché malien afin d’éviter toute rupture, un comité de veille existe au ministère du Commerce, et se réunit chaque vendredi pour faire l’état d’approvisionnement. « Toutes les mesures sont prises pour bien approvisionner le pays », a-t-il dit. Selon l’invité de l’ORTM, le gouvernement fait beaucoup pour diminuer le prix des produits. A cet effet, le gouvernement perd des centaines de millions par mois, aux cordons douaniers, liés aux mécanismes de réduction des prix. Des efforts sont faits également pour améliorer les revenus des salariés. Selon le ministre l’impact de la mise en œuvre du protocole d’accord entre le gouvernement et l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) est de 50 milliards de FCFA sur le budget national.

Viandes interdites d’importer

Sur la question de l’interdiction de l’importation de poulet de chaire, certains avaient accusé le gouvernement d’agir dans ce sens sous la pression de puissants fonctionnaires aviculteurs déguisés en opérateurs économiques. Mais le ministre a été on ne plus claire : «L’interdiction de la viande de volaille date de 2009, et c’est une mesure qui a été prise en son temps parce qu’il y avait la grippe aviaire ». La mesure, toujours en cours, se justifie du fait que la grippe aviaire continue toujours. « L’année dernière, il y avait la grippe aviaire dans un pays de la sous région. Donc nous ne pouvons pas accepter de laisser ces poulets de chaire et autres venus de partout inonder notre marché sans prendre le minimum de disposition. La mesure qui est prise est de protéger la santé des consommateurs », avise le ministre. « Cette mesure a été prise par rapport à la grippe aviaire et cette maladie est toujours d’actualité et c’est aussi valable pour la viande de bœuf, parce qu’en réalité vers les années 2000, 2001 et 2002, il y avait la maladie de la vache folle ». Ainsi des mesures ont été prises pour protéger la santé des consommateurs, et protéger notre cheptel en interdisant l’importation de ces produits, d’autant qu’existe un potentiel en la matière. « Nous ne violons aucune disposition légale et réglementaire. Aucun engagement du Mali au niveau international n’est violé en prenant ces décisions. Même l’OMC accepte que les pays prennent souvent des décisions, si c’est pour protéger la santé des populations », a indiqué le ministre Abdel Karim Konaté.

Il a rappelé qu’il y a eu l’augmentation des droits et taxes sur la pomme de terre et un certain nombre de produits pour protéger la production nationale. « Il ya eu une grosse polémique, certains ont dit que c’est pour protéger X ou Y parce que de 20% on est partie à 35% », a-t-il dit.

Interdit d’exporter du bois brut

S’agissant de la question faisant allusion à l’interdiction d’exportation du bois, le ministre a tenu à la précision car ce n’est pas le ministre du Commerce seul qui a pris la décision, mais de concert avec son homologue de l’Environnement. C’est après avoir reçu l’information selon laquelle, du coté de Kenieba, il y a des gens qui se sont installés avec du matériel moderne en train de décimer les forêts, que le ministre du Commerce a soutenu qu’un pays sahélien ne peut pas se donner le luxe d’exporter du bois brut, a t-il expliqué. « En rapport avec le ministère de l’environnement nous avons pris un arrêté interministériel pour suspendre l’exportation du bois pour voir claire. Effectivement ce n’est pas du bois brut. A ce niveau, nous n’avons pas de problème en rapport avec le ministère de l’environnement, nous allons procéder à la régularisation. Mais nous disons et nous maintenons que nous n’allons pas accepter l’exportation du bois brut parce que nous sommes un pays sahélien. Et ce n’est pas contre nos engagements internationaux. Encore une fois à l’OMC, nous pouvons prendre des mesures de sauvegarde pour tout ce qui touche à l’environnement », a expliqué le ministre pour édifier les Maliens et des partenaires intéressés par le bois maliens.

En outre, aux dires du ministre, des textes réglementaires sont entrain d’être rédiger pour interdire l’exportation et même l’abattage de l’âne car les animaux destinés à l’abattage au Mali sont connus et l’âne n’en fait pas partie.

Encourager les usines maliennes

Selon l’invité de l’ORTM, le ministre dit avoir proposé, il ya quelques mois, au Premier ministre en Conseil des cabinets, l’arrêt de certaines formes d’exonérations, au profit des usines qui produisent au Mali. C’était au sujet des exonérations qui étaient données dans le cadre de la construction des logements sociaux, aux entreprises qui importaient ces matériaux de constructions. Elles étaient exonérées du payement du droit des taxes sur le ciment sur le fer surtout les matériaux de construction qui étaient importés, libres, de tout droit et taxe aux cordons douaniers. « Nous nous sommes dit que nous avons des usines qui font les mêmes matériaux de construction. Pourquoi nous allons détruire des emplois ici chez nous et aller en créer ailleurs ? Nous avons proposé l’arrêt de ces exonérations. Comment vous pouvez comprendre que nous avons des usines de peinture, des usines de carreaux , des usines de fer et quelqu’un qui doit faire 500 ou 600 logements sociaux demande l’exonération sur toute la quantité du ciment, de peinture et fer qu’il importe, on lui accorde ça, or il y a des unités qui produisent ces mêmes matériaux sur place. Donc il va continuer à importer parce qu’il est exonéré aux cordons douaniers, je dis que c’est une aberration et nous avons proposé l’arrêt de ces formes d’exonérations. Nous leur avons demandé de se ravitailler auprès de nos usines en demandant les mêmes avantages », a clarifié le ministre Konaté.

La question cruciale des loyers est une préoccupation qui n’a pas échappé au ministre. Il a indiqué que le texte qui réglemente les loyers en République du Mali date de 1967. Ce texte est dépassé et ne peut même pas s’appliquer, d’où l’urgence d’une réglementation dans ce domaine, et à laquelle le ministre du Commerce s’attèle.

Vers des loyers bas

Le premier défenseur des consommateurs est le président de la République, si l’on en croit au ministre. Le ministre comprend bien qu’aujourd’hui, la préoccupation majeure des Maliens est le loyer. Vous êtes dans un bâtiment, du jour au lendemain on vous fixe un prix, une semaine après le propriétaire de la maison vient proposer un autre prix. Et les personnes sont souvent renvoyées des maisons sans aucune considération, il ya énormément de problèmes qui entourent la question du loyer, décrit si bien le ministre. « Nous avons reçu instruction des plus hautes autorités du pays, nous avons proposé un décret qui est dans le circuit d’approbation qui a même fait l’objet de validation en atelier avec tous les acteurs et qui est dans le circuit d’approbation en conseil des ministres », a dévoilé le ministre Abdel Karim Konaté. Ainsi que quelques innovations majeures dudit décret.

Faire en sorte que le loyer étalé sur l’année ne puisse pas dépasser 5% de la valeur de l’immeuble. Ce qui a l’avantage de limiter l’augmentation abusive du prix de loyer. A cet effet une commission nationale va être créée pour prendre en charge des préoccupations liées au loyer.

Il y a aussi les cautions que le propriétaire impose, souvent vous ne pouvez pas avoir le bâtiment sans trois mois de cautions et trois mois d’avance. « Nous avons dit que tout cela n’est pas normal et nous avons ramené à un mois seulement de caution », rassure le ministre. Il ya beaucoup d’autres innovations dans le document qui feront que le consommateur soit rassurer, a indiqué le ministre. D’autres sujets ont été évoqués comme le bon déroulement de l’élection du bureau de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Mali (CCIM), le problème d’obtention du Visa chinois par les commerçants maliens, et l’opération de libération des voix publiques effectuée par Madame le Gouverneur du district de Bamako, Ami Kane.

A. Dissa

Les Secrets Bancaires