Libreville, Dimanche 9 Février 2025 (Infos Gabon) – L’Est de la RDC est depuis quelques semaines le théâtre d’une guerre menée par le M23 soutenu par le Rwanda. Les rebelles et leurs alliés qui contrôlent la ville de Goma n’ont même pas laissé de couloir à une aide humanitaire au profit des victimes de ce conflit armé.
Ce sont au total trois mille (3000) personnes qui ont été tuées par la guerre menée à l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) par le M23 et le Rwanda. Ce conflit a également occasionné plusieurs blessés à Goma, la capitale du Nord-Kivu, selon les chiffres de l’ONU.
Le sujet est au centre de tous les débats. Les politiques, les humanitaires, les experts, les religieux, les citoyens et les artistes se sont tous mobilisés pour que soit mis fin à cette situation qui n’a que trop duré. Les sportifs ne sont pas en reste.
Les joueurs sont montés au créneau pour attirer l’attention des différents clubs sportifs qui travaillent avec le Rwanda de rompre leurs partenariats avec ce pays pour leur soutien à cette guerre qui a entrainé le déplacement de 440 000 personnes. Parmi ces clubs, il y a Paris Saint Germain (PSG), Arsenal et Bayern Munich. Le dernier cité a même envoyé une délégation au Rwanda pour s’enquérir de la situation.
Sur le terrain, si les agences humanitaires de l’Organisation des Nations Unies (ONU) craignent la propagation épidémique dans la région, les politologues de leur côté alertent sur les risques que cette guerre se transforme en un conflit régional. La mobilisation est donc totale, c’est comme si tout le monde a attendu cette dérive pour se réveiller.
Des réunions se multiplient à Kinshasa, Malabo, Dar es Salaam, New York, Genève, en Europe et en Afrique pour analyser la situation et proposer des solutions concrètes. C’est dans ce sens que s’est tenu samedi en Tanzani un sommet extraordinaire conjoint de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).
Appel à un cessez-le-feu immédiat
A Dar es Salaam, la capitale tanzanienne, où le président Rwandais, Paul Kagame était présent, les dirigeants ont appelé à un cessez le feu et un retrait immédiat des troupes non invitées en RDC.
Dans son intervention, la Présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan qui pense à une réponse africaine aux problèmes du continent, a demandé aux chefs d’Etat et de gouvernement de l’EAC et de la SADC de s’unir pour trouver une solution durable à ce conflit. “L’histoire nous jugera durement si nous ne faisons rien”, a-t-elle indiqué en substance.
Conscients que la crise en RDC touche l’ensemble de la communauté internationale, les Présidents kényan William Ruto et Zimbabween Emmerson Mnangagwa qui est aussi président en exercice de la SADC, pensent de leur côté qu’elle doit impérativement être résolue.
“Nous devons aborder ce sujet avec honnêteté, ouverture d’esprit et flexibilité”, a déclaré Emmerson Mnangagwa qui compare la situation à l’Est de la RDC à la lutte contre la colonisation.
Au final, les dirigeants ont décidé d’un cessez-le-feu immédiat et du retrait des troupes non invitées à ce conflit. Ils ont également appelé aux négociations directes et au dialogue avec toutes les parties étatiques et non étatiques, y compris le M23.
Un plan organisationnel des mesures prises sera mis en place dans cinq (5) jours conformément aux accords de Luanda et Nairobi pour l’application desdites mesures. Le Rwanda et la RDC sont tous les deux membres de la SADC, la EAC et la Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale (CEEAC). Curieux !
Les leaders de la CEEAC qui s’étaient réunis en session extraordinaire le 7 février 2025 à Malabo, en Guinée équatoriale, ont eux aussi condamné l’occupation de l’Est de la RDC par les rebelles du M23 et leurs alliés avant de lancer un appel à un cessez-le-feu immédiat. Sans oublier un plan humanitaire pour venir en aide aux victimes de cette guerre et un programme de réintégration des personnes déplacées.
Rappel de l’histoire de deux héros nationaux à Libreville
A Libreville, la capitale gabonaise, la diaspora congolaise a choisi une autre approche en commémorant les deux héros nationaux à l’occasion d’une journée organisée en leur mémoire.
Ainsi, dans une conférence-débat le 25 janvier dernier portant sur le thème “Patrice Emery Lumumba et Laurent Désiré Kabila, quel héritage politique ?”, le pasteur Richard Elruch Landu Kiimbhi Mabiala, l’organisateur de cette journée commémorative a édifié l’auditoire sur le parcours de ces deux hommes d’Etat.
Une initiative louable et très appréciée de la part des participants qui ont effectué le déplacement de l’hôtel Excellence situé dans le quartier Ancien Sobraga au centre de Libreville.
Situant l’enjeu de cette journée, le pasteur a déclaré : “Notre initiative vise à sensibiliser les compatriotes autour des valeurs d’exemplarité, de courage, de combativité et de résilience qui ont caractérisé ces grands hommes de l’histoire politique congolaise”.
Côté assistance, la satisfaction était visible : “Des tels moments de partage et de sensibilisation nous manquent terriblement alors que ce sont des belles occasions d’un enrichissement mutuel et d’apprentissage, surtout pour nos enfants qui naissent à l’Etranger”, a soutenu Guy Ngoie, présent à cette conférence.
Pour sa part, Felix Wata Bikelebieto, le conférencier du jour, a plongé l’auditoire dans les repères historiques, avec un focus particulier d’abord sur le parcours de Patrice Emery Lumumba, son enfance, sa formation et sa vie professionnelle trempée dans l’activisme syndical.
C’est sur le volet de son engagement politique, a précisé le conférencier, que Lumumba a laissé ses marques les plus indélébiles pour son rôle clé joué pour l’avènement de l’indépendance du pays lors de la Table ronde de Bruxelles, son discours osé devant le Roi des Belges le 30 juin 1960, jour de l’indépendance et son bref passage éclair au poste de Premier ministre du nouvel Etat du Congo Démocratique.
A cause de ses idées souverainistes et son combat nationaliste pur jus, il n’a pas pu échapper à la furia des forces néocolonialistes décidées à faire main basse sur les ressources du Congo qui ont fini par l’assassiner sauvagement le 16 janvier 1961.
Il a payé au prix de sa vie son engagement politique d’un Congo uni et indivisible et surtout son rêve de voir les richesses du sous-sol profiter effectivement aux Congolais.
Bondissant sur le combat de Laurent Désiré Kabila, le conférencier a évoqué son long parcours dans la résistance, son maquis dans le corridor Est du pays et sa prise de pouvoir le 17 mai 1997 par le renversement du régime de Mobutu Sese Seko Kukungwendo Wazabanga.
Dans un style pédagogique d’une grande clarté, le conférencier a su faire le lien entre le combat nationaliste de Lumumba et son prolongement à travers son héritier politique Laurent Désiré Kabila qui a tenu tête face aux assauts répétés des forces impérialistes occidentales et leurs envies prédatrices des ressources du sous-sol congolais.
Pour avoir résisté farouchement et s’être positionné en grand défenseur des intérêts du Congo, comme deux versions d’un même destin croisé, Laurent Désiré Kabila a, à son tour, été envoyé dans l’au-delà suite à un assassinat brutal le 17 janvier 2001.
“L’héritage politique à retenir de ces deux héros nationaux qui ont payé de leur sang reste, sans nul doute, la défense d’une République Démocratique du Congo unie, indivisible doublée de la défense de sa souveraineté afin de voir ses ressources du sol et sous-sol effectivement bénéficier aux Congolais”, a dit le conférencier en guise de conclusion.
Le débat suscité dans la foulée de cette communication est révélateur de la soif des Congolais à vouloir se familiariser avec l’histoire de leur pays, de forger leur esprit sur fond des débats de portée intellectuelle sachant que l’homme ne se nourrit pas que du pain.
Un héritage symbolisé par le message testamentaire de Laurent Désiré Kabila qui, sentant sa mort pointer à l’horizon, invitait les Congolais à “ne jamais trahir le Congo”.
Un testament d’actualité qui raisonne fort et une invite faite aux Congolais sur place au pays et ceux de la Diaspora afin de faire preuve de résilience particulièrement en ces moments douloureux que traverse le pays avec la chute de Goma tombée entre les mains “des troupes rwandaises”, non pardon les rebelles du M23 soutenus par l’armée Rwandaise.
L’histoire pour juger les dirigeants africains
Au delà de ces différentes rencontres, l’ONU, l’Union européenne, les Etats-Unis, l’Union Africaine, la SADC, l’EAC, la CEEAC ainsi que les autres puissances doivent comprendre que l’homme du moment est différent de celui du Moyen-Age ou de l’époque coloniale. Il faut donc qu’une issue définitive soit trouvée à ce conflit qui oppose apparemment deux peuples voisins (rwandais et congolais) qui sont obligés de cohabiter au delà de l’ère Kagame et Tshisekedi.
C’est aussi valable pour les autres conflits en Afrique que les leaders de la CEEAC ont mentionné à l’occasion de leur sommet extraordinaire de Malabo.
Dans le monde actuel où Elon Musk et les autres leaders montrent les défis à relever, il est honteux qu’on assiste encore en Afrique à des scènes de guerre entre citoyens d’un même pays ou ceux des pays voisins à l’image de ce qui se passe entre le Rwanda et la RDC. Les dirigeants africains pensent que leurs collègues de l’Union Européenne peuvent-ils accepter ce genre de situation sur leur sol ?
Cette interpellation vaut son pesant d’or parce qu’apparemment certains n’ont pas encore compris que les hommes passent, mais l’histoire est là. De l’héritage de guerre, de division, de haine, de méchanceté qu’ils auraient légué à leurs peuples qui sera relaté ?
Des peuples voisins qu’ils ont transformés en ennemis qui se regarderont en Chiens de faillance ?
Et c’est dommage que les africains de ce rang n’aient pas encore compris que 140 ans après la conférence de Berlin, l’Afrique ne semble toujours pas jouer un rôle important dans le monde. Et ce n’est pas avec ce genre de comportement qu’elle pourra changer la donne. Le Rwanda seul ne représente rien et ne représentera jamais rien du tout, même après des siècles et des siècles.
Cette situation étonne tellement qu’un admirateur du président Rwandais, présent à la conférence de Libreville, lui qui a toujours dit que Paul Kagame est un modèle pour avoir bâti un Rwanda moderne et exemplaire, à la question de savoir si son héro Rwandais était également une fierté pour l’Afrique ? Motus et bouche cousue ! L’écolier de Kagame est, non seulement déçu, mais également dépassé d’entendre que son mentor soutiendrait les rebelles qui ont ôté la vie aux ressortissants d’un pays voisin !
En tous cas, ces populations confrontées déjà à des problèmes de santé, l’éducation, les transports, les infrastructures, la sécurité, le logement et d’autres liés à l’intégration que leurs dirigeants n’arrivent pas à résoudre, n’ont pas besoin de vivre le cinéma que leur livre le M23 visant à piller les richesses nationales.
Et c’est là qu’on réalise le poids des propos tenus par la présidente tanzanienne concernant cette crise. Elle n’a pas du tout tord de dire que “l’histoire nous jugera durement si nous ne faisons rien”.
Oui, l’histoire jugera les dirigeants africains de ce qu’ils feront de cette crise et de toute parcelle de responsabilité qui leur a été confiée. Les églises et le cardinal Ambongo qui multiplient des initiatives de réconciliation depuis Kinshasa en faveur d’un dialogue constructif entre les parties en conflit ne diront pas le contraire.
Viendra l’heure où l’on demandera des comptes aux uns et aux autres. Ont-ils travaillé pour développer le continent ? Nos dirigeants ont-ils oeuvré pour l’intérêt du continent et de ses populations ? Ou ont-ils travaillé pour la politique de la terre brulée ?
Quel héritage laisseront-ils à l’Afrique puisqu’ils ne sont pas éternels ? Que pensent-ils quand ils sont convoqués par la CPI et non les autres ?
Ce genre de conflit entretenu par les voisins ne donne t-il pas raison à ceux qui disent que l’Afrique n’est pas rentrée dans l’histoire ? Qu’est-ce que les générations futures apprendront d’eux ? Des génocides au Rwanda et en RDC ? Du geno-cost, du nom de ce nouveau génocide pour des gains économiques ?
Où iront les 440 000 personnes déplacées de l’Est puisque Donald Trump ne veut plus d’immigrés aux Etats-Unis ? Elles ne devront même pas compter sur lui pour leur envoyer une aide quelconque puisqu’il est entrain de tout bloquer.
Des questions auxquelles les dirigeants africains sont appelés à répondre. Pour que l’histoire parle d’eux peut-être du bon côté comme on témoigne aujourd’hui de Patrice Eméry Lumumba, Sekou Touré, Thomas Sankara, Diallo Telli, Nelson Mandela, Laurent Désiré Kabila et les autres. Pensent-ils vraiment à ce qui se passera un jour à leur absence ? A eux-mêmes de répondre.
Signalons qu’à propos de cette crise, le Président Kagame (Tutsi du Rwanda) accuse son homologue congolais Félix Tshisekedi d’avoir négligé les préoccupations légitimes des Tutsis congolais qui sont victimes de discrimination. En plus, selon lui, les rebelles opposés au régime de Kagali ont été autorisés par l’armée congolaise à être actifs dans les régions de l’Est de la RDC.
Le Corridor de Lobito une des solutions durables
Les différents médiateurs de cette crise doivent intégrer dans ce processus l’accélération des travaux de construction du Corridor de Lobito entre la RDC, la Zambie et l’Angola. Cet espace facilitera déjà la sortie et la vente légales des minerais qui sont à l’origine des différentes guerres à l’Est de la RDC.
Des conflits armés qui sont à l’origine du geno-cost qui vient de coûter la vie à 3000 personnes juste en quelques semaines, et nous rappelle le génocide qu’a connu le Rwanda voisin.
Suivront d’autres ponts du genre pour éradiquer définitivement les différentes guerres autour des matières premières derrière lesquelles se cachent souvent de fausses rébellions, qui sont loin des préoccupations réelles du peuple que nous avons énumérées ci-haut.
FIN/INFOSGABON/SM/2025
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