C’est ce week-end que devront s’ouvrir à Bamako les festivités marquant la célébration du 20e anniversaire de la mort de l’écrivain Amadou Hampâté Bâ. Organisé par la Fondation du même nom, cette commémoration revêt un symbole, comme l’explique le Pr. Youssouf Tata Cissé, ancien collaborateur de l’écrivain. Selon lui, Amadou Hampâté a consacré sa vie à la recherche du savoir. Ce savoir, dira-t-il, il l’a partagé avec les hommes de son époque et les générations à venir. Célébrer Hampâté Bâ, ajoute Youssouf Tata Clissé, est un devoir de mémoire.
Quant à la présidente de la Fondation Amadou Hampâté Bâ, l’organisation de cet évènement s’inscrit dans le cadre des travaux de perpétuation de l’œuvre de son père. Pour Mme Sissoko Rokiatou Bâ, il s’agit à travers les activités de partager l’œuvre de l’écrivain et de le faire connaitre davantage de la jeune génération d’universitaires. La présidente de la Fondation, qui reprend l’idée de l’écrivain que « la mort n’existe pas dans la société traditionnelle africaine », a expliqué que cette commémoration constitue un rite traditionnel.
La célébration du 20e anniversaire de la mort d’Amadou Hampâté Bâ prévoit un programme aussi divers que varié. Il offre l’occasion aux participants de méditer sur la pensée de l’écrivain et sa contribution à la civilisation. Il est ainsi prévu une exposition sur la vie et l’œuvre de l’auteur, une soirée culturelle samedi au Centre international de conférence de Bamako. Cette soirée enregistrera la participation d’artistes de grande renommé comme Toumani Diabaté, Guimba, Cheick Tidiane Seck, l’orchestre Kanaga de Mopti, etc. La commémoration du 20e anniversaire de la mort d’Amadou Hampâté Bâ, c’est aussi les débats à travers la table ronde prévue dimanche au Palais de la culture portant son nom. Cette table ronde, qui consacre le rendez-vous du donner et du recevoir, devra enregistrer la participation de grandes sommités de la culture malienne. Il s’agit, entre autres, du Pr. N’Tji Idriss Mariko, Filifing Sacko, Aminata Dramane Traoré, Youssouf Tata Cissé, etc.
Ecrivain, philosophe, historien, etc.
Né en 1900 à Bandiagara, chef-lieu du pays Dogon et ancienne capitale de l’Empire toucouleur du Macina, Amadou Hampâté Bâ est descendant d’une famille peule noble. Il fréquente d’abord l’école coranique de Tierno Bokar, un dignitaire de la confrérie tidjaniyya, avant d’être réquisitionné d’office pour l’école française à Bandiagara puis à Djenné. En 1915, il se sauve pour rejoindre sa mère à Kati où il reprendra ses études.
En 1921, il refuse d’entrer à l’École normale de Gorée. À titre de punition, le gouverneur l’affecte à Ouagadougou, en qualité d’« écrivain temporaire à titre essentiellement précaire et révocable ». De 1922 à 1932, il occupe plusieurs postes dans l’administration coloniale en Haute-Volta (actuel Burkina Faso) puis jusqu’en 1942 à Bamako. En 1933, il obtient un congé de six mois qu’il passe auprès de Tierno Bokar, son maître spirituel.
En 1942, il est affecté à l’Institut français d’Afrique noire (IFAN) de Dakar grâce à la bienveillance de son directeur, le professeur Théodore Monod. Il y effectue des enquêtes ethnologiques et recueille les traditions orales. Il se consacrera notamment à une recherche de quinze ans qui le mènera à rédiger « l’Empire peul du Macina ». En 1951, il obtient une bourse de l’Unesco lui permettant de se rendre à Paris et de rencontrer les milieux africanistes, notamment Marcel Griaule.
En 1960, à l’indépendance du Mali, il fonde l’Institut des sciences humaines à Bamako et représente son pays à la Conférence générale de l’Unesco. En 1962, il est élu membre du Conseil exécutif de l’Unesco. En 1966, il participe à l’élaboration d’un système unifié pour la transcription des langues africaines. En 1970 prend fin son mandat à l’Unesco.
Amadou Hampâté Bâ se consacre alors entièrement à son travail de recherche et d’écriture. Les dernières années de sa vie, il les passera à Abidjan à classer ses archives accumulées durant sa vie sur les traditions orales d’Afrique de l’Ouest ainsi qu’à la rédaction de ses mémoires, « Amkoullel l’enfant peul » et « Oui mon commandant ! », qui seront publiés en France en 1991. Auteur de plusieurs livres, il meurt à Abidjan en mai 1991. 20 ans après le monde intellectuel malien et africain se souvienne de l’homme.
Issa Fakaba Sissoko
L’ indicateur Renouveau 13/05/2011