Les statistiques des expulsions des maliens du pays de Mouammar Kadhafi sont effroyables : Pour l’année 2008, 420 Maliens ont été expulsés du sol libyen. Beaucoup ont été traumatisés par la violence de la répression et la nature du régime carcéral (privation de nourriture et d’assistance médicale pour les malades et les blessés). Ils continueront malheureusement de garder pour le reste de leur vie les séquelles physiques et psychologiques de ces violences. Certains en sont morts et dans des conditions qui offensent la dignité et la sensibilité humaines. C’est le cas, entre autres, de Modibo Kéita (de la région de Kayes) et d’Abdoulaye Sangaré (de Sikasso) morts en 2008 alors qu’ils étaient emprisonnés avec 53 autres Maliens dans la prison de Barack en plein désert libyen. La plupart de ces compatriotes indignement expulsés par Mouammar Khadafi, travaillent depuis des années sur le sol libyen et n’étaient pas des sans-papiers.
Pour l’année 2009, 153 Maliens ont été expulsés en septembre après avoir passé plusieurs mois en détention dans les prisons libyennes. Ils ont été soumis, au vu et su de l’opinion, aux traitements des plus humiliants et dégradants avant d’être spoliés de leurs biens. Plusieurs de nos compatriotes sont décédés au cours de leur détention dans ce pays qui aime s’illustrer dans les arènes internationales comme le ferment de l’unité et de l’intégration africaines. Le lundi 03 mai 2010, vers 16H00, l’Association des maliens expulsés (AME) prévenue par des correspondants de la Radio France Internationale (RFI), a été témoin de l’expulsion de 149 Maliens en provenance de la Libye. Une 150e personne, un homme entre la vie et la mort, n’a pu prendre l’avion.
Il fallait attendre le mardi 25 janvier 2011 pour voir la récidive des autorités libyennes. 140 autres maliens se sont vus débarqués à l’aéroport international de Bamako-Sénou dans des conditions qui n’avaient rien à envier à la traite coloniale. Pourtant, le guide libyen est présenté comme l’ami privilégié du Mali. N’a-t-il pas été invité d’honneur des festivités commémoratives du cinquantenaire de notre pays, célébrées le 22 septembre 2010.
Ces expulsions qui violent toutes les conventions internationales en matière de protection et de respect des droits de l’homme, n’enregistrent (malheureusement) aucune réaction, même symbolique des autorités maliennes sur lesquelles tombent sans cesse des pluies de pétrodollars et des carnets de chèques pour leur esprit de concession et d’allégeance aux capitaux libyens qui investissent de nos jours tous les secteurs stratégiques et rentables de l’économie malienne. Quand on sait qu’avec ses pétrodollars, Kadhafi est en train d’aménager des milliers d’hectares dans la zone Office du Niger ; qu’il a fini d’acheter tous les hôtels de Bamako ; qu’il a financé à 56 milliards de nos francs la cité ministérielle, on comprend pourquoi les autorités maliennes sont obligées de regarder impuissantes ses ressortissants installés en terre libyenne en train de payer la rançon des pétrodollars de Mouammar Kadhafi.
Abdoulaye Diakité
L’ Indicateur Renouveau 28/01/2011