Les Maliens et leurs partenaires exhortés à l’introspection pour changer le paradigme de la sécurité au Sahel
Le Premier ministre de la Transition, Dr Choguel Kokalla Maïga, a pris la parole devant la 76e session ordinaire de l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies (ONU) samedi dernier (25 septembre 2021).
Les actes posés dans le cadre du processus de transition, le terrorisme et l’insécurité, dont les effets pervers sur les populations sont accentués depuis plus d’un an par ceux de la crise sanitaire liée au Covid-19, le mandat de la Minusma… sont les principaux sujets abordés par le Chef du gouvernement à New York (Etats-Unis).
«Miser sur l’espoir pour renforcer la résilience afin de se relever de la COVID-19, reconstruire durablement, répondre aux besoins de la planète, respecter les droits des personnes et revitaliser l’Organisation des Nations Unies».
Tel est le thème de la 76e session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies (ONU) devant laquelle le Premier ministre de transition a pris la parole samedi dernier (25 septembre 2021).
«Le Mali souscrit pleinement à l’esprit et à la lettre de ce thème qui résume parfaitement les idéaux de notre organisation commune», a souligné Dr Choguel Kokalla Maïga.
«C’est une lapalissade d’affirmer que le Mali et les pays du Sahel sont, de nos jours, confrontés à l’hydre du terrorisme, à l’extrémisme violent et à l’instabilité.
Cela dure depuis plus d’une décennie, avec le risque d’enlisement, de banalisation ou de lassitude…», a-t-il poursuivi.
A ce quotidien «fait d’angoisses et de tragédies» est venue s’ajouter la pandémie du Covid-19 avec «ses impacts négatifs sur l’économie et sur les conditions de vie de nos populations déjà précaires du fait des défis économiques, politiques et humanitaires».
En conséquence, a rappelé le chef du gouvernement, «rarement un pays ou une région aura été aussi durement éprouvé par l’empilement des crises plus que le Mali et les Etats du Sahel».
Le Premier ministre a profité de cette tribune pour édifier l’opinion internationale sur les efforts consentis par les autorités actuelles pour mener la transition en cours à bon port en prenant soin de doter le pays d’institutions fortes pour lui éviter tout retour à la case-départ dans 5 ou 10 ans.
Il a ainsi indiqué que le Plan d’action du gouvernement (PAG) de transition, adopté le 2 août 2021 par le Conseil national de transition (CNT), contient «un ensemble de mesures dont la mise en œuvre va assurer la prise en charge des préoccupations majeures des populations éprouvées par la crise sécuritaire, politique, sanitaire et économique».
«De mars 2012 à ce 25 septembre 2021 où je m’adresse à vous du haut de cette auguste tribune, la situation de mon pays ne s’est guère améliorée, malgré le soutien international et la présence sur notre sol d’une Opération de paix de l’ONU (MINUSMA), et des forces internationales : l’Opération française Barkhane, la Force européenne TAKUBA et la Force conjointe du G5 Sahel», a reconnu Dr Choguel K. Maïga.
Une population de plus en plus désemparée et exaspérée par l’insécurité grandissante
Bien au contraire, a-t-il déploré, «la situation continue progressivement de se détériorer, au point que des pans entiers du territoire national échappent au contrôle du gouvernement.
Mes concitoyens vivent sous l’emprise des Groupes armés terroristes (GAT) dans le déni de leurs droits les plus élémentaires.
Leur accès aux services de base demeure hypothétique en raison de la faible présence des services de l’Etat, consécutive à l’insécurité grandissante».
En peignant ce tableau sombre des Etats du Sahel, le Premier ministre souhaitait exhorter tous les acteurs à «l’introspection, afin de changer de paradigme en matière de sécurité au Sahel».
Et surtout que, a-t-il indiqué le déploiement de la Minusma, les résolutions de 2100 (2013) et 2164 (2014) sont d’une évidente et d’une brûlante actualité huit ans après.
«Les populations maliennes sont exaspérées aujourd’hui devant les tueries de masse, les villages rasés de la carte et d’innocents civils fauchés, dont des femmes et des nourrissons souvent brûlés vifs», a rappelé Choguel.
Et d’ajouter, «les Maliennes et les Maliens ont le net sentiment que la mission assignée à la Minusma a changé en cours de route, et notamment depuis 2015, suite à la signature de l’Accord pour la paix et la réconciliation, alors même que les défis qui ont justifié son déploiement sont restés constants».
A son avis, la fin de l’Opération Barkhane doit «inciter les Nations unies à avoir désormais une posture plus offensive sur le terrain».
Et Dr Choguel Kokalla Maïga a tenu à rassurer les participants à la 76e session ordinaire de l’Assemblée générale de l’ONU, qu’il n’existe pas de «sentiment anti-Minusma au Mali, pas plus qu’il n’existe pas de sentiment anti-français dans notre pays.
Non ! Je le dis sans ambages. Notre peuple n’a jamais été et ne sera jamais un peuple ingrat».
Toutefois, a-t-il expliqué, au sommet de l’Etat et au sein des populations maliennes, il existe «un désir de paix et une soif de sécurité qui font écho à l’exigence d’efficacité des instruments et des mécanismes politiques et militaires mis en place et qui font paradoxalement du Mali un pays sur-militarisé, mais très vulnérable face au terrorisme devenu un facteur de désintégration de nos sociétés et de déstabilisation des fondements de l’Etat»
Adapter le mandat de la MINUSMA à la réalité de l’environnement dans lequel la mission évolue
Que devrions-nous faire face à un tel paradoxe ? Que faut-il faire pour répondre à l’angoisse, à l’exaspération et à la colère des populations maliennes ? Que faut-il faire pour répondre au sentiment d’insatisfaction à la fois des Maliens et des partenaires du Mali ? «Nous devons avoir le courage et la lucidité d’interroger les instruments et les mécanismes évoqués plus haut.
Nous devrions aussi et surtout remettre sur la table la demande d’un mandat plus robuste et d’un changement de posture de la Minusma régulièrement faite par notre gouvernement au Conseil de sécurité de l’ONU».
Cette évolution sera de nature à adapter le mandat de la Minusma, de lui donner les moyens de s’acquitter convenablement de son mandat et de répondre à l’aspiration du peuple malien.
Une «aspiration sans laquelle ni la Mission de l’ONU ni les autres partenariats militaires internationaux et régionaux présents sur notre sol n’auront de crédibilité aux yeux de mes concitoyens», a souligné le PM.
En termes clairs, a-t-il insisté, «les Nations unies doivent aider le Mali à lutter plus efficacement contre la criminalité transnationale organisée afin d’asseoir les conditions véritables de sa stabilisation, gage de la réussite des actions de soutien politique, humanitaire, de développement et de protection des droits de l’Homme».
A défaut, la communauté internationale doit souffrir que les Maliens tournent le dos à la Minusma et les forces internationales en se posant des questions pertinentes et légitimes sur l’utilité de leur présence au Mali !
Naby